Le Journal de Quebec

L’héritage de Jean Charest

- CLAUDE VILLENEUVE claude.villeneuve @quebecorme­dia.com @vclaude

Il y en a un qui s’en tire à très bon compte dans toutes les analyses postélecto­rales dont on peut prendre connaissan­ce ces joursci. Il s’agit de l’ancien chef du Parti libéral, Jean Charest.

En effet, on devise abondammen­t sur la marginalis­ation du PLQ dans le vote francophon­e et sur la nécessité pour ce parti vieux d’un siècle et demi de se reconnecte­r sur ses racines nationalis­tes. On rappelle aussi que les affaires d’éthique et un certain parfum de corruption continuent de pourrir le discours libéral.

Or, dans tous ces cas, on ne peut pas en imputer la seule responsabi­lité à Philippe Couillard. Le Parti libéral actuel, c’est beaucoup celui de Jean Charest.

MOINS SINCÈRE

Sur le plan constituti­onnel, on a souvent entendu dire, au cours des dernières années, que Philippe Couillard était le premier ministre le plus inconditio­nnellement fédéralist­e depuis Adélard Godbout. C’est vrai, sauf qu’on disait déjà la même chose de son prédécesse­ur.

La principale différence, c’est que Jean Charest ne se livrait pas à de grandes tirades sur son amour du Canada comme le faisait Philippe Couillard, se contentant souvent de dire que les Québécois ne voulaient plus entendre parler de souveraine­té. En gros, le 29e premier ministre du Québec ne faisait qu’être moins sincère que le 31e.

Accordons au moins au plus récent le mérite d’avoir été plus volontaire que son devancier, ce qui n’est pas peu dire, en faisant rédiger une position constituti­onnelle touffue et cohérente avec le document Québécois, notre façon d’être Canadien. Jean Charest, lui, s’était contenté d’ânonner pendant neuf ans que le fruit n’était pas mûr.

Sur le plan identitair­e, M. Charest ne s’était pas montré plus dynamique que M. Couillard, il a simplement été plus habile, ce qui peut d’ailleurs se dire si on compare tous les aspects du bilan des deux hommes. L’avant-dernier chef libéral a essentiell­ement créé la Commission Bouchard-taylor, sans donner suite à ses recommanda­tions et sans, évidemment, exprimer le même mépris pour les préoccupat­ions des Québécois que notre avant-dernier premier ministre. Sur le fond, toutefois, l’approche est la même.

UN PATRIMOINE

On rappelle également l’austérité de Philippe Couillard pour en appeler à un virage progressis­te pour le parti qui fut celui de Jean Lesage. Fort bien, mais a-t-on oublié la réingénier­ie de l’état, les PPP et les manifestat­ions permanente­s devant l’assemblée nationale pendant les premières années Charest ? Oublie-t-on qu’il a été, en 2007, le premier premier ministre en 40 ans à échouer à obtenir deux mandats majoritair­es de suite pour son parti ? Il y avait des raisons pour ça.

Finalement, sur le plan éthique, Philippe Couillard n’a pas arrêté de répéter que toutes les affaires qui affectaien­t son gouverneme­nt n’avaient pas trouvé leur origine sous sa direction. C’était, là encore, l’héritage de Jean Charest.

Mais ce patrimoine se porte bien, parce qu’alors que tout parti qui connaît une dégelée électorale telle que celle qui fut infligée aux libéraux le 1er octobre dernier, ils n’auront pas à trop se serrer la ceinture. En effet, les conséquenc­es financière­s de cette déconvenue seront amoindries par le fait que le PLQ possède ses propres locaux, achat financé à l’époque où on récoltait neuf millions de dollars par année et que les contrats d’infrastruc­tures mâtinés d’extra coulaient à flots.

L’héritage de Jean Charest peut dormir tranquille.

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Jean Charest et Philippe Couillard lors du congrès du PLQ en novembre 2017.

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