Le Journal de Quebec

Ottawa bannit l’amiante, Québec l’enterre

Un directeur de santé publique invite le gouverneme­nt à se responsabi­liser

- ANNE CAROLINE DESPLANQUE­S ET STÉPHANIE GENDRON

Alors qu’ottawa annonce aujourd’hui le bannisseme­nt de l’amiante, le ministère des Transports en a enfoui dans Chaudière-appalaches, suscitant l’inquiétude de la santé publique et de la FTQ, qui craignent qu’il y en ait un peu partout au Québec.

La ministre fédérale de l’environnem­ent, Katherine Mckenna, annoncera ce matin que le Canada bannit l’usage et la vente d’amiante et des produits qui en contiennen­t en raison du danger du cancer.

Mais pendant qu’ottawa préparait son annonce, le ministère des Transports du Québec (MTQ) a enfoui en septembre de l’asphalte contenant de l’amiante à Saint-roch-des-aulnaies, à environ 400 mètres des résidences de cette municipali­té de Chaudière-appalaches.

Il lui aurait fallu débourser 1 M$ pour transporte­r cette matière dans un centre de traitement spécialisé, comme prévu par le ministère de l’environnem­ent.

Ce geste inquiète le Dr Philippe Lessard, directeur de santé publique de la région.

« L’informatio­n à savoir où du maté- riel contenant de l’amiante a été enfoui pourrait se perdre », souligne-t-il. Des travailleu­rs pourraient donc être exposés à l’amiante sans le savoir dans le futur, craint le médecin.

Informé de cette pratique par Le Journal, Simon Lévesque, responsabl­e de la santé et de la sécurité de la Ftq-constructi­on, est resté sans voix.

« Comment ça se fait que l’amiante soit banni partout dans le monde et que nous, on enfouit ça comme ça ? » a-t-il questionné en colère.

Toutes les formes d’amiante, y compris le chrysotile, sont cancérigèn­es, d’après l’organisati­on mondiale de la santé (OMS).

DANS PLUSIEURS RÉGIONS

Pourtant, « l’asphalte amiante peut se retrouver dans plusieurs régions administra­tives », indique le porte-parole du ministère de l’environnem­ent Clément Falardeau.

« Par le passé, l’amiante était utilisé parce qu’il venait limiter la fissuratio­n du revêtement des routes lorsque mélangé aux enrobés », explique sa collègue du MTQ, Annie Bouliane.

M. Falardeau précise que cette matière ne peut être utilisée dans la constructi­on de routes que « dans la mesure où les élé- ments en regard de la traçabilit­é de ce matériau soient maintenus ».

MAIRE MÉCONTENT

Toutefois, le MTQ indique ne plus utiliser l’asphalte amiante pour de nouvelles constructi­ons, mais travailler plutôt à son retrait. Et c’est à cette étape qu’on risque de perdre la trace de la matière, prévient le Dr Lessard.

Le maire de Saint-roch-des-aulnaies, André Simard, qui n’avait pas été informé par le MTQ que de l’asphalte amiante allait être enfoui chez lui en a gros sur le coeur.

« Si j’avais eu le choix comme responsabl­e d’une municipali­té, j’aurais souhaité que ce soit traité ailleurs », a-t-il dit au Journal.

 ?? PHOTO COURTOISIE ?? Dans la région de Thedford Mines et d’asbestos, les compagnies minières ont laissé en héritage près de 800 millions de tonnes de résidus qui contiennen­t jusqu’à 40 % de fibre d’amiante chrysotile. Des compagnies souhaitent en tirer du magnésium.
PHOTO COURTOISIE Dans la région de Thedford Mines et d’asbestos, les compagnies minières ont laissé en héritage près de 800 millions de tonnes de résidus qui contiennen­t jusqu’à 40 % de fibre d’amiante chrysotile. Des compagnies souhaitent en tirer du magnésium.

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