Jeune victime au sang-froid
Elle aide à faire arrêter un présumé prédateur du Web
Un internaute de la France soupçonné d’avoir fait plusieurs victimes de crimes sexuels sur les réseaux sociaux pourrait regretter amèrement de s’être invité dans l’ordinateur d’une Québécoise de 11 ans.
Antonio Bockell, un étudiant de 27 ans dont Le Journal rapportait l’arrestation sur un campus universitaire en banlieue de Paris, la semaine dernière, est soupçonné d’avoir piégé jusqu’à 77 mineures du Québec depuis un an.
PREUVES CONSERVÉES
Toutefois, une plaignante de 11 ans et résidant en Mauricie a spontanément conservé plusieurs « souvenirs » d’un clavardage à la tournure inattendue avec ce suspect. Et les éléments de preuve potentiellement incriminants qu’elle a amassés risquent maintenant d’aboutir devant la justice française.
« J’ai été très impressionné par les bons réflexes que ma fille a eus. Elle a su garder son sang-froid même si ce n’était pas évident », a relaté le père de cette jeune en entrevue au Journal.
Le père, dont l’identité ne peut être divulguée pour protéger celle de la plaignante, a expliqué que sa fille échangeait avec une amie sur Messenger quand une internaute ayant le profil d’une autre jeune fille s’est jointe à elles, en novembre 2017.
EN DIRECT
« Rien ne laissait croire que ce n’était pas une fille, a-t-il expliqué. Ça discutait de choses assez anodines, puis la discussion a basculé de l’écrit à la vidéo. Et la première chose qu’elle a vue, c’est un homme en train de se masturber en direct. Son visage n’apparaissait pas sur l’écran, seulement ses parties intimes. »
Malgré la surprise, sa fille a immédiatement effectué plusieurs captures d’écran de son ordinateur pour « garder des preuves ».
Elle a ensuite alerté son père, qui a aussitôt communiqué avec la Sûreté du Québec pour porter plainte et remettre ces images aux policiers.
« Quand les policiers sont venus, ce faux profil sur Facebook avait déjà été supprimé. Je gardais peu d’espoir qu’ils puissent en retrouver l’auteur », a-t-il dit.
Au printemps dernier, le suspect a récidivé en se cachant derrière une photo de profil où l’on voyait un groupe de filles.
« La personne disait fréquenter une école de coiffure et de mannequins, a poursuivi le père. Un moment donné, il a écrit : “On s’est déjà parlé, te souviens-tu de moi ? On a fait une vidéo”. Alors ma fille a fait ni une, ni deux. Elle est venue m’avertir et on a rappelé les policiers. »
EN ARRIÈRE-PLAN
La SQ et la police de Paris ont pu localiser l’ordinateur du suspect par son adresse IP. Quand les limiers français ont appréhendé Bockell chez lui, ils ont saisi le matériel informatique installé dans sa chambre et divers objets, dont une « doudou ». La jeune Québécoise croit avoir immortalisé dans ses captures d’écran certains de ces objets, qui se trouvaient en arrière-plan du suspect et qui sont de nature à l’incriminer. Aucune des victimes québécoises n’a pu voir son visage.
« J’ai dit à ma fille qu’elle pouvait être fière d’elle. Comme tout parent, en 2018, on sait que la cybercriminalité fait partie de la réalité. Il faut en discuter avec nos enfants et être proactif », a insisté son père.