Faire flèche de tout bois
Loïc Dehoux a réussi à greffer sa passion de l’ébénisterie à un projet d’affaires de vélos en bois
Il y a quatre ans, Loïc Dehoux a démissionné de son poste en communications chez Équiterre pour se consacrer à sa passion, l’ébénisterie.
« J’avais envie de travailler sur du concret », raconte celui qui nourrit un intérêt pour le travail du bois depuis son enfance. Une histoire de famille puisque son grand-père et un de ses oncles étaient charpentiers-menuisiers.
Aujourd’hui, il est associé pas dans une, mais bien dans deux entreprises qui développent des produits d’ébénisterie, dont Picolo Vélo, le « seul fabricant de vélos en bois au Canada et peut-être dans le monde ».
REGROUPER LES FORCES
Il a commencé par fonder Amik Ébénisterie avec Nicolas Goupil, ébéniste de métier lui aussi. En plus de dessiner et de fabriquer des meubles sur mesure et du mobilier architectural, les deux hommes louent des espaces dans leur atelier pour ceux qui veulent travailler un projet personnel.
C’est ainsi qu’en 2015, ils ont fait la connaissance de Pierre Laplante qui souhaitait fabriquer un cadre de vélo en bois pour son usage personnel. Une rencontre qui a changé le cours des choses pour les deux entrepreneurs.
« Pierre a travaillé pendant des mois sur son prototype jusqu’à ce qu’il arrive au bout de ses ressources. On trouvait que son produit avait un bon potentiel commercial, on lui a alors proposé de s’associer », raconte Loïc Dehoux, qui est aussi un adepte du vélo.
Le projet se greffait bien à l’ébénisterie. C’était aussi un pari un peu fou, ce qui était loin de déplaire aux artisans.
« Il y avait plusieurs défis techniques, mais justement, c’est ce qui nous fait vibrer. »
Il leur fallait notamment trouver la meilleure essence de bois pour un vélo performant. Ils ont finalement opté pour le frêne blanc, qui pousse en abondance dans nos forêts. Son autre avantage : sa bonne capacité d’absorption des vibrations qui procure un confort supérieur aux cyclistes.
Il leur a fallu trois ans de développement (et trois prototypes) avant d’arriver au produit final qui a été officiellement lancé sur le marché en février 2018.
Leur objectif est de produire une centaine de vélos par année. Le carnet de commandes se remplit à un bon rythme considérant que le vélo Picolo se détaille 4500 $.
Ils ont aussi d’autres produits en développement sur la table à dessin, dont un « vélo de gravelle », plus polyvalent, qui permet de rouler hors route. Ils mènent également des tests pour fabriquer d’autres parties du vélo en bois.
Pour le moment, ce sont les activités de l’ébénisterie qui financent en partie le démarrage de Picolo Vélo. Une campagne de financement a aussi permis de recueillir des fonds dans la phase de développement du produit.
DISCUSSION AVEC DES DÉTAILLANTS
Les associés sont à la recherche d’un investisseur pour accélérer la commercialisation. Ils sont également en discussion avec des détaillants pour une plus large distribution de leur produit.
« On aimerait inverser les rôles pour que ce soit Picolo qui finance l’ébénisterie et non l’inverse », explique Loïc Dehoux.
Gérer deux entreprises de front est parfois essoufflant, reconnaît-il. « J’ai pris un mois de vacances cet été, les premières depuis quelques années. J’en avais vraiment besoin. »
Malgré les semaines bien remplies, il ne regrette rien de sa vie d’employé.
« Je me levais le matin sans trop de motivation, alors qu’aujourd’hui, chaque jour apporte un nouveau défi. On croit à notre projet, on travaille sur le long terme. C’est fatigant, mais la réussite finit par effacer le parcours difficile. »