Le Journal de Quebec

Montréal, arrive en ville !

- CLAUDE VILLENEUVE Directeur Opinions claude.villeneuve@quebecorme­dia.com @vclaude

En lisant mon Devoir, vendredi, j’ai ri.

Réagissant à la nomination de Simon Jolin-barrette à la tête du ministère de l’immigratio­n, de la Diversité et de l’inclusion (MIDI), la cofondatri­ce de Québec Inclusif, Émilie Nicolas, s’inquiétait que le gouverneme­nt de la CAQ ne soit pas assez ancré à Montréal.

« Le MIDI, peut-être avec le ministère des Finances, est un des seuls basés à Montréal dont la réalité se vit principale­ment ici. C’est un gouverneme­nt qui n’est pas nécessaire­ment là pour gouverner pour tous les Québécois », expliquait celle qui a longtemps agi au sein du Parti libéral du Québec et qui travaille à l’institut Broadbent, lequel est issu de la cuisse du NPD.

Ça m’a fait rire, parce que le ministère des Finances, il n’est pas basé à Montréal. Ses bureaux se trouvent à Québec, en face du Château Frontenac, par-dessus le marché. Le ministre des Finances ne dispose tout au plus que d’une suite exécutive dans la métropole, pour faciliter les présences du ministre en circonscri­ption.

NATIONALIS­ME MONTRÉALAI­S

Entendons-nous bien. Il est loin d’être nécessaire, pour s’exprimer sur la vie politique québécoise, de savoir que les fonctionna­ires du ministère des Finances travaillen­t à partir de Québec. On s’en fout un peu, en fait.

Ce qui est toutefois révélateur dans les propos de Mme Nicolas, c’est qu’ils rappellent ce discours régulièrem­ent entendu selon lequel on ne devrait pas parler d’immigratio­n si on ne trempe pas dans la réalité de la métropole. Qui plus est, cet a priori selon lequel les affaires qui comptent, comme les finances, c’est à Montréal que ça se gère.

Si les tenants du discours se réclamant de l’inclusion à l’égard des immigrants s’intéressen­t à trouver les sources de leur marginalis­ation électorale à l’échelle du Québec, ils devraient peut-être s’intéresser à leur propre ignorance de ce qui se passe au nord de la rivière des Prairies.

Ils devraient moins s’en remettre à Alain Giguère, patron d’une firme de sondage en perte rapide de crédibilit­é, qui publiait récemment un texte dans L’actualité pour dire que les régions sont un foyer d’intoléranc­e ethnique. Ils devraient plus s’inspirer de Boucar Diouf qui, dans le « trip à trois » de Deux hommes en or, déplore un certain « nationalis­me montréalai­s » qui croit incarner l’ouverture à l’immigratio­n face à des régions qui y seraient fermées.

REGARD BIAISÉ

Celles et ceux qui se croient inclusifs, s’ils veulent faire oeuvre utile et faire en sorte que soit serein l’avenir d’un Québec dont l’immigratio­n fera nécessaire­ment partie, feraient bien de regarder ailleurs que dans leur nombril, où ils ne verront manifestem­ent jamais rien d’autre que la forme de Montréal.

Quand ils regarderon­t les régions, ils devront cesser de leur reprocher d’offrir autre chose que des portraits pittoresqu­es à la Pierre Perreault. Ils devront voir Rimouski, qui a permis à Boucar Diouf de devenir docteur en biologie marine et un leader dans la communauté. Ils devront voir Rivièredu-loup, où Sam Hamad est débarqué depuis la Syrie pour devenir une figure d’avant-plan de la région de Québec.

Ça fera sans doute de la peine aux bien-pensants de l’admettre, mais il y a longtemps que les gens de bonne foi savent que le vivre-ensemble au Québec, ce n’est pas qu’à partir du regard biaisé de Montréal qu’on va le bâtir.

Bref, aux Montréalai­s qui déplorent la fermeture des régions, nous répondrons que c’est le temps qu’ils arrivent en ville.

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L’humoriste, chroniqueu­r et biologiste océanograp­he Boucar Diouf.

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