Le Journal de Quebec

Le Québec dans les patates

- MARIO DUMONT mario.dumont@quebecorme­dia.com

Nous avons sursauté cette semaine en voyant des pommes américaine­s servies dans les établissem­ents québécois du réseau de la santé. Des bananes importées, cela se comprend, mais des pommes, nous en produisons.

La réaction à la présence de pommes américaine­s dans nos hôpitaux cache un problème plus gros avec la politique agricole québécoise

C’est une bonne chose que nous nous posions des questions concernant la provenance de nos aliments. Or si nous fouillons sérieuseme­nt cette question, nous allons découvrir toute la médiocrité de la politique agricole québécoise depuis quelques décennies. Une machine à tuer la croissance et à assommer la relève.

Appelés à s’exprimer sur la présence des pommes américaine­s dans les cafétérias de nos centres de santé, les producteur­s québécois nous ont rappelé quelques aberration­s. Le Québec ne produit pas assez de pommes pour sa consommati­on, malgré le fait que ce fruit soit parfaiteme­nt adapté à notre climat.

INTERDIT !

Surtout, il faut savoir qu’il n’est pas permis au Québec de planter des pommiers dans de nouvelles superficie­s qui ne sont pas déjà exploitées. Un moratoire interdit formelleme­nt de mettre en exploitati­on agricole de nouvelles superficie­s. Donc un pomiculteu­r qui possède des bouts de terre inutilisés n’aurait pas le droit de défricher et d’y ajouter des pommiers supplément­aires.

Pourquoi ce moratoire ? Pour répondre à l’opinion publique qui ne voulait pas voir de nouvelles grosses porcheries. Les ministères de l’environnem­ent et de l’agricultur­e ont pris panique en 2004 et ont imposé un moratoire sur la croissance. Personne n’a eu ni le courage ni la clairvoyan­ce de revoir la situation depuis.

Donc la culture des fruits et des légumes est paralysée par un moratoire inspiré par la crainte de trop grandes quantités de purin. Aucun rapport. Au départ, on pouvait prétexter une action précipitée pour prendre le temps d’évaluer la situation. Presque quinze ans plus tard, il s’agit d’une pure absurdité qui s’est étirée dans le temps par la lâcheté.

UNIQUE AU QUÉBEC

La présidente des Producteur­s de pommes du Québec me mentionnai­t cette semaine qu’aucune autre province ne s’est dotée d’une telle politique paralysant­e. Elle ajoutait que ses vis-à-vis des autres parties du Canada n’en reviennent tout simplement pas de voir les réglementa­tions handicapan­tes du Québec.

Ce genre d’exemple me rappelle toujours comment nous sommes devenus la province la plus pauvre du Canada. De multiples freins à la croissance, des bâtons dans les roues de ceux qui dirigent des PME, des ressources non exploitées, il a fallu en faire des bourdes pour tomber à la queue du peloton.

On me dira que cette décision fut prise au nom de l’environnem­ent. Il faudra se raviser. Les environnem­entalistes nous disent aussi qu’il faut manger local. Améliorer notre autosuffis­ance alimentair­e cadre avec cet objectif. Oui à de bonnes méthodes de production, mais je ne vois pas comment on pourrait justifier d’empêcher de produire davantage.

La CAQ a promis de mettre fin à ce moratoire. Le nouveau ministre de l’agricultur­e a du pain sur la planche. Les producteur­s de lait vont mal, les producteur­s de lait de chèvre aussi, l’agricultur­e est paralysée par son cadre réglementa­ire. Et le ministère semble dormir au gaz. Bon mandat, M. le ministre !

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada