CRI DU COEURÀ TRUDEAU
Omar Abdulaziz réclame l’aide du premier ministre pour faire libérer ses proches en Arabie saoudite
Omar Abdulaziz ( photo), ami du journaliste saoudien Jamal Khashoggi assassiné il y a trois semaines à Istanbul, demande au premier ministre canadien d’intervenir pour protéger ses proches emprisonnés en Arabie saoudite.
Omar Abdulaziz est convaincu que Riyad a utilisé le redoutable logiciel malveillant Pegasus pour espionner ses conversations presque quotidiennes avec Jamal Khashoggi, journaliste saoudien au
Washington Post assassiné à Istanbul. « Ils ont hacké mon téléphone, donc c’est certain qu’ils ont vu mes conversations avec Jamal. Imaginez ! Ils nous écoutaient et ils lisaient tout ce que nous nous écrivions. C’est délirant ! »
Pegasus avait infecté son iphone en juin, selon un groupe de chercheurs en cybersécurité de l’université de Toronto. Le Citizen Lab affirme que le serveur auquel le logiciel envoyait les informations volées à Omar Abdulaziz est lié à l’arabie saoudite.
Notre Bureau d’enquête révélait le 3 octobre que la Gendarmerie royale du Canada avait ouvert une enquête à ce sujet.
CONTRER LA PROPAGANDE
Alors qu’ils étaient probablement sur écoute, Omar Abdulaziz et Jamal Khashoggi planchaient sur un nouveau projet, baptisé « The bees » : coordonner un réseau d’activistes sur Twitter pour contrer la propagande de la dictature.
Quelques jours avant d’être assassiné, Jamal Khashoggi avait lui-même transféré 5000 $ dans le compte du militant sherbrookois au Québec pour ce projet, dit Omar Abdulaziz. « Et il me disait qu’il y en aurait plus. »
Un réfugié saoudien de Sherbrooke, proche du journaliste assassiné il y a trois semaines en Turquie, demande au premier ministre Justin Trudeau d’intervenir auprès de Riyad pour faire libérer deux de ses frères et huit de ses amis.
Omar Abdulaziz avait des conversations presque quotidiennes avec Jamal Khashoggi. L’assassinat de ce chroniqueur du Washingtonpost, en plein consulat saoudien à Istanbul, ébranle la planète et compromet les relations de Riyad avec le reste du monde.
Avec lui, Omar Abdulaziz comptait coordonner à partir du Québec un réseau d’activistes pour combattre la propagande du régime en ligne.
Mais la pétromonarchie épiait ses discussions téléphoniques avec le chroniqueur, selon un groupe de chercheurs en cybersécurité. Omar Abdulaziz craint aujourd’hui que cela ait pu contribuer à la décision saoudienne de tuer Jamal Khashoggi ( voir autre texte).
L’activiste, qui étudie aujourd’hui à l’université Bishop, assure que la dictature saoudienne a jeté ses proches en prison pour faire pression sur lui, afin qu’il cesse de critiquer le régime.
OTTAWA DIT VOULOIR AGIR
Abdulaziz compte faire parvenir dans les prochains jours des lettres au bureau du premier ministre Justin Trudeau et à la ministre des Affaires mondiales, Chrystia Freeland.
« Au minimum, je voudrais qu’ils fassent quelque chose pour les faire sortir de prison! » dit-il.
Il assure que ses proches sont « en grand danger ». « C’est délirant que les vies d’autant de gens soient détruites, dit-il. Et tout ça pour me faire taire ! »
Dans un courriel, le cabinet de la ministre Freeland assure qu’elle exigera des comptes à Riyad au sujet des menaces planant sur les proches de l’activiste saoudien.
« Les préoccupations soule- vées par Omar Abdulaziz au sujet de la situation à laquelle font face sa famille et ses amis sont profondément inquiétantes, dit l’attaché de presse Adam Austen. Le Canada compte soulever cette question avec l’arabie saoudite. »
Ottawa se dit aussi inquiet de l’espionnage dont il aurait fait l’objet. « Nous sommes préoccupés par les allégations que le droit à la vie privée de M. Abdulaziz a été bafoué, et nous comprenons que la police canadienne est en train d’enquêter sur cette affaire. »
ASILE POLITIQUE
L’opposant de 27 ans a obtenu l’asile politique en 2013 alors qu’il devenait de plus en plus critique envers le royaume du Golfe sur Youtube et Twitter.
Il voudrait qu’ottawa intervienne non seulement pour ses frères et ses amis, mais pour tous les prisonniers politiques en Arabie saoudite.
« Il y a tellement d’activistes en prison, il faut faire quelque chose ! »
Omar Abdulaziz a d’ailleurs des contacts réguliers avec une autre réfugiée saoudienne de Sherbrooke : Ensaf Haidar, la femme de l’activiste Raif Badawi, qui croupit dans les geôles de la pétromonarchie depuis six ans.
Chrystia Freeland a dénoncé le 2 août l’emprisonnement de la soeur de Raif, Samar Badawi. Elle a du même coup déclenché une crise diplomatique avec Riyad, qui a décrété une série de sanctions économiques contre Ottawa.
« Le Canada fait un bon travail, dit Omar Abdulaziz. Mais nous devons mettre plus de pression pour qu’au moins, l’arabie saoudite y pense à deux fois avant de faire des choses pareilles. »
L’ambassade saoudienne à Ottawa n’a pas répondu à nos courriels.
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