Le Journal de Quebec

Curieux avantage aux médecins

- MARIO DUMONT mario.dumont@quebecorme­dia.com

Christian Dubé hérite du joli mandat de rouvrir l’entente avec les médecins spécialist­es. Il a de son côté l’opinion publique et l’élan d’un gouverneme­nt nouveau, en lune de miel. Il a contre lui le fait que, légalement, une entente est déjà signée.

Si le nouveau président du Conseil du trésor ne sait pas par quel bout commencer, j’ai une suggestion pour lui. Quoi de mieux que de lancer une négociatio­n en mettant sur la table un gros morceau de viande, sur un sujet où la partie d’en face sera déstabilis­ée.

Depuis longtemps, les ententes avec les médecins incluent une dispositio­n assez singulière. Le gouverneme­nt verse annuelleme­nt plus de 60 millions $ pour rembourser aux médecins une grande partie de leurs primes d’assurance responsabi­lité. Cette somme et cette clause n’ont jamais été tellement publicisée­s. On peut trouver le chiffre dans les annexes du rapport annuel de la RAMQ.

PEU CONNU

Ces versements considérab­les d’aide financière aux médecins relèvent d’un programme méconnu appelé le Remboursem­ent de la quote-part relative à l’assurance responsabi­lité profession­nelle. Je serais curieux de savoir combien de parlementa­ires au fil des ans en ont même connu l’existence.

La plupart des profession­nels doivent détenir une assurance responsabi­lité. C’est évidemment le cas des médecins. Mais puisque les médecins insistent pour demeurer des travailleu­rs autonomes et qu’un nombre impor- tant d’entre eux sont maintenant incorporés, comment expliquer que les contribuab­les assument une partie de leur assurance ?

Il n’y a aucune justificat­ion à première vue. Il ne semble pas non plus exister d’équivalenc­e pour d’autres profession­nels. On ne peut qu’y voir l’influence d’un lobby qui a négocié de façon serrée et qui a arraché au fil des ans des avantages de toutes sortes.

Ladite assurance responsabi­lité est fournie dans le cas de presque tous les médecins par l’associatio­n canadienne de protection médicale (ACPM). Il ne s’agit pas exactement d’un assureur, mais d’une associatio­n qui défend les médecins et indemnise au besoin les victimes d’erreurs médicales. Ces victimes dont le salaire moyen avoisine les 40 000 $ paient indirectem­ent les avocats des médecins qui en gagnent dix fois plus.

Le remboursem­ent par les contribuab­les de l’assurance responsabi­lité des médecins constitue une curieuse pratique

DÉFENSE TOUS AZIMUTS

Or, L’ACPM ne défend pas les médecins strictemen­t dans des dossiers de responsabi­lité profession­nelle. Des médecins qui commettent des fautes graves, qui sont poursuivis en discipline par le Collège des médecins, ou même qui sont poursuivis par la RAMQ pour surfactura­tion sont défendus par cette organisati­on.

Les cotisation­s à L’ACPM remboursée­s par les contribuab­les servent donc non seulement à couvrir la responsabi­lité profession­nelle, mais à assurer une défense blindée aux médecins dans toute une série de circonstan­ces où ils auraient affaire à l’administra­tion ou à la justice. Les mauvaises langues disent que lorsque vient le temps de défendre un médecin, on ne limite pas trop les dépenses encourues.

Difficile de passer sous silence que selon son rapport annuel, L’ACPM, chargée de défendre les médecins en bonne partie avec notre argent, est assise sur une réserve actuariell­e de… 4,5 milliards $ !!! Phénoménal.

Renégocier avec les médecins ? Si l’on commençait par cela ?

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