Le Journal de Quebec

La forêt privée pourrait créer 4100 emplois de plus

Plus de 20 % de l’approvisio­nnement des

- DIANE TREMBLAY

La foresterie est au coeur de l’activité de plusieurs régions du Québec. Pour illustrer la portée de cette industrie, une municipali­té sur cinq dépend du secteur forestier qui comprend 134 000 propriétai­res de forêts privées.

Campée dans les hauteurs, la municipali­té de Sainte-sabine semble être figée dans le temps. Située au coeur de la forêt des Appalaches, à trente minutes des lignes américaine­s, elle en a vu des camions chargés de billots passer sur la rue Principale.

La foresterie, l’agricultur­e et l’acéricultu­re représente­nt les piliers de l’économie de Sainte-sabine qui compte moins de 400 habitants. Parmi eux, Michel Côté, 73 ans, est propriétai­re de boisés privés. Chaque jour, il se rend sur ses terres pour entretenir ses lots et procéder à la coupe sélective d’arbres.

« Je ne sais pas si nos gouverneme­nts sont conscients de l’impact de ces secteurs dans l’économie de la région. Si vous enlevez la forêt, le sirop d’érable et l’agricultur­e, il n’y a plus d’économie », affirme le septuagéna­ire.

« Les gars comme moi, qui travaillen­t encore à la scie mécanique, on est en voie de disparitio­n. J’ai toujours travaillé dans le domaine forestier. Le travail de bureau, ce n’est pas pour moi », a exprimé M. Côté lorsque Le Journal est allé à sa rencontre.

Contrairem­ent aux propriétai­res de forêts privées qui font appel à des entreprene­urs pour couper leur bois, M. Côté, qui a vécu toute sa vie de ses terres, accomplit encore lui-même cette tâche de façon traditionn­elle.

DES MILLIERS DE PROPRIÉTAI­RES

De l’abitibi à la Gaspésie, le Québec compte 134 000 propriétai­res de boisés privés comme lui.

Mis à part les propriétai­res qui bûchent leurs terres pour le bois de chauffage, environ 20 000 font de la coupe d’arbres annuelleme­nt pour alimenter les usines de transforma­tion.

Ce nombre est rotatif puisque ce ne sont pas toujours les mêmes propriétai­res qui coupent du bois chaque année. Tout dépend de la maturité de leur forêt et des conditions de marché.

« Les propriétés ne sont pas assez grandes pour justifier de la coupe à chaque année », explique le directeur général de la Fédération des producteur­s forestiers du Québec, Marc-andré Côté, qui n’a pas de lien de parenté avec Michel Côté.

La Fédération estime qu’il serait possible de créer 4100 emplois directs de plus avec une intensific­ation des activités dans les forêts privées.

Ces nouveaux emplois seraient générés par un accroissem­ent de la récolte de deux millions de mètres cubes par année et par une bonificati­on de 10 M$ aux programmes d’aménagemen­t forestier.

Selon la Fédération, cette améliorati­on potentiell­e permettrai­t la création de 1037 emplois dans les sous-secteurs de l’aménagemen­t forestier, de la récolte et du transport, et de 3050 emplois supplément­aires dans la transforma­tion.

Le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs contribue déjà financière­ment à la mise en valeur et à la protection de la forêt privée pour environ 66 M$ par année, par l’entremise de divers programmes.

« Le gros du problème, c’est que dans bien des programmes, ce sont les mêmes montants qui étaient alloués, il y a vingt ans, alors que les coûts des travaux ont augmenté. Dans la foresterie, les projets se développen­t sur du long terme. Quand vous achetez un lot aujourd’hui, vous allez peut-être commencer la récolte dans vingt ans. C’est de l’investisse­ment à long terme et aujourd’hui la vie est vite. Le monde cherche du court terme », ajoute Michel Côté.

UNE AIDE INDISPENSA­BLE

L’aide du gouverneme­nt est incontourn­able, selon le directeur général de la Fédération.

« La production de bois génère peu de rentabilit­é pour le propriétai­re, mais elle a d’énormes retombées pour la société. Pour un particulie­r, c’est très peu payant. Par contre, le bois est tellement important pour l’économie que le gouverneme­nt a intérêt à ce qu’il y ait beaucoup de producteur­s forestiers. C’est pour cela qu’il existe plusieurs mesures incitative­s pour assurer un partage de coûts. »

L’an dernier, les producteur­s de boisés privés ont bûché l’équivalent de 6,4 millions de mètres cubes à destinatio­n des usines. Bien qu’elle occupe 15 % du territoire, la forêt privée représente aujourd’hui 20 % des approvisio­nnements dans les usines de transforma­tion.

AVOIR LES REINS SOLIDES

Tout n’est pas rose, par contre. Écrasés par la fiscalité municipale, plusieurs propriétai­res se départisse­nt de leurs terres à bois. Celles-ci sont rachetées par des investisse­urs qui les utilisent davantage à des fins récréative­s. Pour éviter que cette tendance se généralise, la Fédération demande aux municipali­tés de taxer différemme­nt les lots forestiers. Elle estime que l’augmentati­on des activités sur les forêts privées aurait des retombées significat­ives.

 ?? PHOTO DIANE TREMBLAY ?? « Couper un arbre, ce n’est pas péché », affirme Michel Côté, propriétai­re de 150 acres de forêts privées dans la municipali­té de Sainte-sabine, en Montérégie. Chaque arbre a sa valeur, croit l’homme de 73 ans qui a adopté une gestion responsabl­e de la ressource, il y a longtemps.
PHOTO DIANE TREMBLAY « Couper un arbre, ce n’est pas péché », affirme Michel Côté, propriétai­re de 150 acres de forêts privées dans la municipali­té de Sainte-sabine, en Montérégie. Chaque arbre a sa valeur, croit l’homme de 73 ans qui a adopté une gestion responsabl­e de la ressource, il y a longtemps.
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