Le Journal de Quebec

LE BONHEUR DANS LA SIMPLICITE

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Même après avoir atteint le sommet, dans la vie, le véritable bonheur demeure rattaché aux choses les plus simples. Ce secret, il y a longtemps que l’a compris Yvon Charest, qui part à la retraite après 18 ans à la tête d’industriel­le Alliance.

Pour sa première journée de retraite de l’entreprise, maintenant désignée comme ia Groupe financier, M. Charest a décidé de s’offrir un cadeau auquel il rêve depuis longtemps : une « patinoire 2.0 », version améliorée de celle qu’il aménage et entretient depuis 10 ans sur son terrain, au mont Sainte-anne.

« Mon cadeau, c’est d’avoir une plus belle patinoire, plus facile à arroser et mieux entretenue, parce que j’aurai plus de temps, lance-t-il avec satisfacti­on, le sourire fendu jusqu’aux oreilles. On va avoir des nouvelles bandes, un nouveau système d’arrosage, un nouveau cabanon, alors je sais très bien ce que je vais faire durant mon premier hiver. »

Le tout fait 65 x 85 pieds et est aménagé sur un terrain que M. Charest a acquis pour être bien certain de ne pas perdre la vue sur le mont Sainte-anne dont il profite au chalet. « Quand j’ai vu que le terrain était à vendre, je me suis dit que c’était le meilleur moyen », dit-il.

Puis il a décidé d’y ouvrir une patinoire, « parce que l’hiver, à Québec, il est assez long qu’il faut trouver une façon de l’apprivoise­r ». Il a rendu l’endroit accessible au voisinage. Les gens peuvent se changer dans le cabanon, trois voisins ont accès au chasse-neige pour l’entretien, et un système d’éclairage a été installé.

« La première année, j’avais écrit : bienvenue à tous, se souvient-il. La deuxième année, je n’ai pas eu besoin […] En 10 ans, j’ai eu des problèmes une seule fois. »

ENTENTE SUR L’AMPHITHÉÂT­RE

Pour l’anecdote, c’est sur cette même patinoire que M. Charest a joué son rôle de négociateu­r pour la gestion de l’amphithéât­re, devenu le Centre Vidéotron, dans un moment crucial. Il avait été recruté par la Ville de Québec pour négocier l’entente.

Deux finalistes ont été retenus, et c’est Québecor qui l’a emporté après d’intenses négociatio­ns. M. Charest recevait, en ce soir de la fin de février 2011, à son chalet du mont Sainte-anne, et s’est retrouvé au beau milieu de la

patinoire, avec son cellulaire, jusqu’à ce qu’une entente de principe intervienn­e, à 21 h 15.

La signature a eu lieu le lendemain, à ses bureaux, des moments que M. Charest n’oubliera jamais. Il admet aujourd’hui avoir été un peu naïf en croyant, à l’époque, qu’il pourrait faire son travail dans l’ombre. Ç’a été possible pendant deux jours, jusqu’à ce qu’il croise un journalist­e par hasard à la sortie de l’hôtel de ville de Québec, lequel a eu tôt fait de l’identifier comme le fameux négociateu­r secret.

Il était après tout question de hockey profession­nel, un sujet qui fait vibrer les gens de Québec, et qui a d’ailleurs fait couler beaucoup d’encre. « J’ai quand même fait beaucoup de bénévolat dans ma carrière et participé à beaucoup de campagnes de financemen­t, mais ce que j’ai fait pour l’amphithéât­re, c’est ce qui reste dans la tête des gens, et ce, même si ça représente à peu près, avec quatre mois d’ouvrage, 1 ou 2 % du bénévolat que j’ai fait. »

M. Charest est content du résultat et de l’entente, il le répète. Il rappelle avoir accepté un système un peu moins transparen­t pour s’assurer d’un résultat optimal. « J’ai aimé ça, car le dossier n’était quand même pas évident. Aujourd’hui, on veut toujours avoir des appels d’offres en bonne et due forme, mais ici, c’était de savoir comment on pouvait structurer une entente qui allait intéresser suffisamme­nt de monde. On a décidé que le plus simple et le plus intéressan­t c’était de mettre dans le même contrat les droits d’identifica­tion et de gestion de l’amphithéât­re. »

Personne, parmi les parties qui se sont montrées intéressée­s, ne s’est d’ailleurs plaint par rapport à la façon de faire. Puis la transparen­ce est venue par après, suite au rapport du commissair­e au lobbyisme, explique M. Charest, rappelant qu’il y était mentionné que deux entreprise­s s’étaient présentées, l’autre étant Bell.

« Beaucoup de gens ont posé leur candidatur­e, en tout ou en partie, et à la fin de la journée, personne n’a critiqué le choix final », souligne-t-il.

MOMENTS PARTICULIE­RS

Par rapport à l’entente, dont il est toujours aussi satisfait, M. Charest se dit bien conscient « que le positionne­ment financier est différent, avec et sans équipe de hockey. Les gens sont tout à fait conscients que, pour la Ville, s’il y a une équipe profession­nelle, ce sera drôlement intéressan­t financière­ment, et qu’en attendant il faut passer une période

plus difficile. Dans mon livre à moi, c’est absolument sans surprise. »

L’homme d’affaires a eu l’avantage de visiter le bâtiment à trois reprises durant la constructi­on, ce qui lui a inspiré beaucoup de respect pour les travailleu­rs qui s’y sont affairés, souvent dans des conditions pas évidentes, en raison du froid, notamment.

À une étape plus avancée, il a pu voir exactement l’emplacemen­t futur où auraient lieu les mises au jeu. « Ç’a été un moment particulie­r, et ce que j’ai vraiment aimé, c’est de pouvoir faire le tour avec les architecte­s et de voir à quel point ça avait été tellement bien réfléchi pour l’expérience client, se souvient M. Charest.

Le sentiment qui ressort, ajoute-t-il, c’est que pour les 400 M$ qui ont été investis, on a vraiment un wow ! Ç’a vraiment été pensé de long en large en ayant à l’esprit le spectateur. »

ORGANISATE­UR EN CHEF

Organisé comme dix, Yvon Charest n’allait pas partir à la retraite à l’improviste ni sans planifier ses projets et ses objectifs. Comme quoi l’homme d’affaires n’est jamais bien loin, même lorsqu’il est question de retraite.

« Quand j’étais président et chef de la direction, je me disais toujours qu’il y a quatre volets dans la vie, soit profession­nel, communauta­ire, familial et personnel. Je m’étais donné des objectifs sur les trois premiers volets, et je me suis dit que si je réussissai­s ça, ce n’était pas grave s’il ne me restait pas beaucoup de temps. »

M. Charest a donc à l’esprit trois objectifs. Il souhaite joindre deux autres conseils d’administra­tion parce qu’il aura plus de temps (il siège déjà sur celui de l’entreprise familiale Boa-franc, de Saint-georges-de-beauce).

Puis, il aimerait trouver le moyen de partager ses connaissan­ces et expérience­s. « Je veux m’investir dans le développem­ent de talents, et je ne sais pas exactement ce que ça veut dire. Alors celui-là, c’est encore un point d’interrogat­ion. »

Le troisième objectif est pour sa part très clair. « Sur une période de quatre ans, on est devenus grands-parents six fois, de petits-enfants qui ont entre zéro et quatre ans et demi, raconte-t-il. Je suis bien conscient qu’à cause de mes responsabi­lités, je n’ai pas consacré autant de temps que j’aurais voulu à ma famille, alors je vais me reprendre avec mes petits-enfants. Je me reprends déjà. »

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 ??  ?? Yvon Charest a été très heureux tout au long de sa carrière, au sein d’une entreprise où le respect de l’individu, quel que soit son poste, représente un élément central. « Dans la vie, dit-il, il faut faire une différence entre le travail que tu occupes et la personne que tu es. Et en tant que personne, tout le monde a la même valeur. »
Yvon Charest a été très heureux tout au long de sa carrière, au sein d’une entreprise où le respect de l’individu, quel que soit son poste, représente un élément central. « Dans la vie, dit-il, il faut faire une différence entre le travail que tu occupes et la personne que tu es. Et en tant que personne, tout le monde a la même valeur. »

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