Les partis politiques à l’heure de la reconstruction
L’élection du 1er octobre dernier a réservé bien des surprises aux analystes, aux sondeurs, aux électeurs et aux partis politiques eux-mêmes.
À l’exception de la CAQ et de QS qui ont enregistré des gains au-delà de leurs espérances, les partis traditionnels, PLQ et PQ ont dégringolé de façon dramatique.
NE PAS NÉGLIGER LA BASE
Avec moins d’un électeur francophone sur cinq et moins de 25 % des votes, le PLQ a enregistré sa pire défaite, en 40 ans, ne comptant plus que 29 députés alors que le PQ n’a fait élire que 10 députés.
Mais indépendamment des résultats, tous les partis politiques — gagnants ou perdants — ont besoin de se reconstruire, la CAQ comprise.
Les partis politiques ont souvent tendance à oublier d’où ils viennent une fois au pouvoir. Ils s’investissent dans la gouvernance de l’état et comptent sur leurs bilans pour se faire réélire. Cette approche n’opère plus.
La CAQ fait donc face à ce défi d’autant plus qu’il s’agit d’un nouveau parti qui n’existe que depuis sept ans. Portée par la vague de changement, sa base militante est presque inexistante à Montréal et dans plusieurs régions du Québec.
Il est donc important pour le premier ministre, François Legault, de s’atteler dès à présent à cette tâche pour asseoir les assises de son parti partout au Québec.
Le PQ a, pour sa part, une grande côte à remonter. Bien que l’option de l’indépendance oscille toujours autour de 30 %, il n’a pas réussi à capter le vote souverainiste que lui dispute, désormais, QS.
Après le douloureux échec de la convergence avec QS, en 2017, la tâche ne sera pas facile pour le parti de René Lévesque de se reconstruire en vue de former le prochain gouvernement.
QS est le parti à surveiller. C’est une force ascendante grâce à sa jeunesse, mais lui aussi doit se redéfinir et surtout se départir de son idéologie marxiste-léniniste pour se mettre au diapason du Québec.
LE PLQ EN PERTE DE REPÈRES
Après sa chute vertigineuse, le PLQ est en proie à la cacophonie. Différents porte-parole cherchent à se démarquer alors qu’aucun diagnostic sérieux de la crise n’a encore été fait.
En l’absence d’une réflexion approfondie sur les causes de leur défaite, ils ont jeté leur dévolu, comme pour exorciser leur traumatisme, sur le nationalisme et les régions.
Il suffit de les entendre définir ce qu’est le nationalisme pour le comprendre. Le chef intérimaire, Pierre Arcand, s’en est tenu à une vision économique, dans le sillage de Jean Charest avec son Plan Nord, de Jean Lesage avec la création de la Caisse de dépôt et placement et d’adélard Godbout avec la création d’hydro-québec.
André Fortin, candidat pressenti au leadership, estime que le PLQ n’a pas besoin d’être plus nationaliste, « pas nécessairement », a-t-il dit, il y a deux jours. « Comment pouvons-nous être plus nationalistes ? Je pense que ça veut juste dire : entendre les régions, être sur le terrain en région, parler aux gens des régions. »
Antoine Atallah, président du PLQ, ne voit pas d’un bon oeil ce nationalisme qu’il associe à une « étiquette [...] un terme connoté au Québec ».
En attendant que la cohésion revienne dans ses rangs, il faut admettre que la débandade du PLQ s’est amorcée quand le parti s’est déconnecté de ses militants et des sensibilités des Québécois francophones, en reniant sa propre histoire.
« Il faut faire attention à la tentation de la majorité francophone », qu’il accusait « d’imposer sa vision aux autres communautés ». Ainsi s’est exprimé M. Couillard, le 12 janvier 2013, à la veille de son arrivée à la tête du PLQ.
En prenant le virage du multiculturalisme à outrance, il a rompu, dès le départ, avec ce nationalisme pragmatique d’un parti qui avait toujours su conjuguer, avant lui, identité québécoise et développement économique. C’est avec cet équilibre qu’il faut renouer.