Le Journal de Quebec

L’histoire de Vanier sous la loupe d’un ancien conseiller municipal

Un livre revient sur les relations tendues entre le quartier et la ville centre de Québec

- TAÏEB MOALLA

Dans un livre qui sera lancé aujourd’hui, l’historien et ancien conseiller municipal Réjean Lemoine décrit « l’histoire d’amourhaine » qui a longtemps caractéris­é les rapports entre la ville centre de Québec et le quartier Vanier (appelé Québec-ouest jusqu’en 1966).

« Québec refuse systématiq­uement de payer ses taxes à Vanier. Et Vanier refuse absolument de payer le coût de l’eau. Il va y avoir des chicanes continuell­es, des fusions et des défusions », raconte M. Lemoine, qui est natif de Vanier, ainsi que la coauteure Sandra Bisson.

Créé en 1916, Québec-ouest est d’abord le projet de spéculateu­rs immobilier­s qui rachètent les terrains agricoles d’occupants anglophone­s pour en faire une grande ville à vocation industriel­le. « C’est un peu un Limoilou raté, compare M. Lemoine. On voulait faire le même type de projet avec le tramway et des ponts. On avait divisé les rues exactement de la même façon. Sauf que ça n’a pas fonctionné. »

LA MAUVAISE RÉPUTATION

Au début du 20e siècle, le quartier acquiert « la mauvaise réputation » qui lui reste longtemps collée à la peau. En l’absence de police, « tous les vices et tout le refoulé de Québec » s’y côtoient. « Il y avait une piste de course, des combats de coqs, du bingo et tous les trafics d’alcool plus ou moins légaux. Toutes les petites mafias étaient là », relate l’historien.

Durant la Première Guerre mondiale, Québec-ouest servira de « bordel de la ville de Québec », décrit Réjean Lemoine. Les lecteurs les plus âgés se souviendro­nt assurément du secteur du « parc minoune » et de la plage du Remous des Hirondelle­s où « les gars et les filles avaient du fun », au grand mécontente­ment du clergé, s’amuse l’auteur.

La crise économique de 1929 n’arrange rien à la situation. La faillite de plusieurs compagnies oblige de nombreux résidents de Saint-sauveur à se réfugier à Québec-ouest, où il n’y a pourtant pas de réseau d’égouts ni d’aqueduc. C’est qu’il est malgré tout possible de survivre dans ce « bidonville » grâce aux activités agricoles.

LONGUE TUTELLE

Financière­ment aux abois et incapable de rembourser ses dettes, Québec-ouest est carrément mis sous tutelle par le gouverneme­nt, de 1933 à 1974. « C’est pour ça qu’on parle d’indigence dans le titre du livre, explique l’historien. Dans les années 1950 et 1960, la Ville va se reconstrui­re petit à petit et développer le plus grand parc industriel de la région. »

Vanier, qui compte 10 % d’immigrants, est aujourd’hui complèteme­nt urbanisé. Ses habitants conservent un fort sentiment d’appartenan­ce au quartier, et ce, malgré les fusions municipale­s du début des années 2000, décrit M. Lemoine.

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PHOTO JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS Réjean Lemoine et Sandra Bisson, auteurs de Québec-ouest/vanier de l’indigence à l’indépendan­ce.

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