Victoire définitive d’hydro-québec sur Terre-neuve-et-labrador
La société d’état pourra continuer à acheter l’électricité à petit prix jusqu’en 2041
OTTAWA | Hydro-québec n’aura pas à partager les profits tirés de la centrale hydroélectrique de Churchill Falls et pourra continuer à leur acheter de l’électricité à bas prix jusqu’en 2041, a tranché la Cour suprême hier matin.
« CFLCO [Churchill Falls (Labrador) Corporation] n’avance aucun motif convaincant, en faits ou en droit, justifiant les tribunaux de remodeler la relation contractuelle qui l’unit depuis 50 ans à Hydro-québec », ont déclaré sept des neuf juges de la Cour suprême, mettant ainsi fin à une lutte qui dure depuis 2010 entre le Québec et Terre-neuve-et-labrador.
La cause du litige : un contrat signé entre les deux parties en 1969 dans lequel Hydro-québec et la société CFLCO s’entendaient pour construire une centrale hydroélectrique à Churchill Falls (au Labrador).
Dans le document, Hydro acceptait de prendre en charge tous les risques financiers de la construction de ce projet « énorme et coûteux ». En échange, elle aurait le droit d’acheter une grande partie de l’électricité à prix fixe et à faible coût jusqu’en 2041.
Or, avec la forte hausse de la valeur de l’électricité dans les dernières années, cette entente s’est avérée extrêmement avantageuse pour la société d’état québécoise, qui revendait l’énergie à l’extérieur de la province à profit. CFLCO affirme qu’hydro a vendu pour plus de 20 G$ d’électricité à ce jour.
CFLCO VEUT RENÉGOCIER
CFLCO a donc demandé en 2009 de renégocier le contrat, ce qu’hydro-québec a refusé de faire. La société terre-neuvienne s’est donc tournée vers les tribunaux québécois afin d’obliger Hydro à rouvrir l’entente, ce qui leur a été refusé à la Cour du Québec et à la Cour d’appel.
Soulignons qu’avant de se rendre devant la Cour suprême, la société de Terre-neuve avait déjà traîné Hydro devant des tribunaux à 17 reprises. Le Journal révélait d’ailleurs l’an dernier que l’acharnement judiciaire de CFLCO dans ce dossier a coûté jusqu’à présent plus de 50 millions $ en frais d’avocats externes à la société d’état.
« Le bénéfice que CLFCO qualifie aujourd’hui de disproportionné, soit la garantie d’achat d’électricité à prix fixe, était du reste perçu à l’époque de la conclusion du Contrat comme un moyen de faire assumer par Hydro-québec un risque que CFLCO ne voulait pas supporter […] Certes, elle en tire aujourd’hui en toute bonne foi des bénéfices substantiels. Mais l’ampleur de ces bénéfices ne justifie toutefois pas de modifier le Contrat pour la priver de cet avantage », a décidé le plus haut tribunal du pays.
Seul le juge Rowe n’est pas d’accord avec cette interprétation, croyant plutôt qu’il faudrait imposer la renégociation, car Hydro-québec profiterait indûment de CFLCO. Même si elle siégeait encore au moment de l’audience de la cause, l’exjuge en chef Mclachlin n’a pas participé au jugement.
HYDRO-QUÉBEC SATISFAIT
Du côté d’hydro-québec, on s’est dit très satisfait du jugement, tout en ajoutant qu’on croyait toujours que l’entente initiale était « juste » pour les parties au moment de sa signature.
On ne croit pas que le refus de la société d’état de renégocier avec CFLCO nuira à son image.
« Je crois que ce jugement va rehausser l’image d’hydro-québec. Cette décision confirme que tout au long de cette relation contractuelle, qui a prêté à controverse, Hydro-québec s’est comporté d’une façon correcte, irréprochable au regard du droit, a indiqué Me Pierre Bienvenu. Ce jugement rejette qu’hydro-québec ait manqué à ses obligations de se comporter de bonne foi dans sa relation avec CLFCO. »