Les Canadiens vulnérables face aux brèches informatiques
De nouvelles règles sont pourtant entrées en vigueur
OTTAWA | Les Canadiens victimes de piratage informatique demeurent très vulnérables malgré l’entrée en vigueur de nouvelles règles, en raison de l’inaction du gouvernement Trudeau, dénonce le commissaire à la protection de la vie privée.
Chaque année, les données personnelles de dizaines de milliers de Canadiens se retrouvent entre de mauvaises mains à cause de brèches informatiques.
Les géants du numérique, dont Facebook, Google, ou le site de rencontres Ashley Madison, ne sont pas épargnés.
Pour endiguer le fléau, Ottawa oblige, depuis jeudi, les entreprises à déclarer les atteintes à la vie privée de leurs clients, et ce, dès que la faille est connue. Le rapport doit être fait sans délai au commissaire et aux consommateurs eux-mêmes.
Or, les libéraux refusent d’offrir au chien de garde de la vie privée les budgets nécessaires pour enquêter.
« Ce n’est pas une grande amélioration quand l’organisme chargé d’appliquer les règles ne reçoit pas les ressources pour faire son travail », déplore Daniel Therrien.
Auparavant, les compagnies pouvaient prendre des mois avant d’informer leur clientèle, qui demeurait entre-temps vulnérable à un vol d’identité ou à une fraude.
M. Therrien estime avoir besoin de 650 000 $ de plus par année pour s’assurer que les entreprises respecteront la loi.
Entre temps, de nombreux cas de violation de la vie privée vont continuer de passer inaperçus, selon lui.
Interpellé sur le sujet, le bureau du ministre responsable du dossier, Scott Brison, a transféré les questions du Journal aux fonctionnaires du ministère.
QUI DIT VRAI ?
Selon un porte-parole du Secrétariat du Conseil du trésor, Martin Potvin, le commissaire Therrien n’a pas encore réclamé « formellement » une hausse de ses budgets, ce que celui-ci dément.
« Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’on a fait une demande », martèle M. Therrien en entrevue téléphonique.
Pour l’opposition néo-démocrate, les règles plus strictes en matière d’atteintes à la vie privée sont pour l’instant un « coup d’épée dans l’eau ». « C’est très troublant de constater qu’on met en place des règles et que, finalement, on n’a pas les ressources pour les faire appliquer », dit le député de Beloeil-chambly, Matthew Dubé.
Le commissaire demande, depuis des années, plus d’argent et de pouvoir. Il souhaite entre autres avoir la possibilité d’imposer des amendes et d’effectuer des inspections afin de s’assurer que la loi est respectée.
LE QUÉBEC EN RETARD
M. Therrien exige, pour ce faire, 12 millions $ supplémentaires sur un budget annuel de 24 M$.
Avec l’entrée en vigueur de la nouvelle loi fédérale, les Québécois sont parmi les Canadiens les moins bien protégés.
En effet, la loi provinciale n’exige pas des entreprises fautives qu’elles déclarent les atteintes aux données personnelles.
Dans la province, la loi fédérale ne s’appliquera donc qu’en partie, c’est-à-dire aux banques et aux entreprises de télécommunication, entre autres.