La débandade du PQ n’a pas ébranlé Bernard Landry
L’ex-premier ministre a accordé une dernière entrevue quelques jours avant de mourir
« JE L’AI FAIT POUR SERVIR LA NATION, FAIRE PASSER LES INTÉRÊTS DU QUÉBEC AVANT LES MIENS »
– Bernard Landry, ex-politicien
VERCHÈRES | (Agence QMI) Même la défaite cinglante du Parti québécois aux dernières élections n’a pas semblé affecter les certitudes de Bernard Landry que le Québec deviendrait un jour indépendant.
« Des fois je suis enragé, mais jamais découragé, a-t-il déclaré dans une entrevue avec le journaliste de TVA Paul Larocque, diffusée hier soir. Parfois, je me demande : “Vais-je voir [l’indépendance] de ma vie ?” »
Quelques jours avant de s’éteindre, l’ancien premier ministre s’est ouvert dans un dernier entretien la semaine dernière sur la cause en laquelle il a cru jusqu’à la fin de sa vie : l’indépendance du Québec.
Il y est apparu affaibli par la maladie pulmonaire qui l’a finalement emporté mardi à l’âge de 81 ans, mais toujours vif d’esprit.
« L’indépendance c’est la fierté, c’est avoir la tête haute. [...] L’indépendance, c’est la cause de ma vie, a-t-il dit. Ma préoccupation, c’était les générations futures. »
En dépit de son état de santé, il a confié au cours de cette discussion qu’il a toujours gardé la conviction profonde qu’un jour le Québec aurait sa place au concert des nations.
Lucide sur le peu d’appétit des Québécois pour la souveraineté actuellement, M. Landry estimait toutefois qu’il fallait mieux expliquer aux jeunes les raisons du combat pour l’accession à l’indépendance.
« Le Parti québécois [PQ], c’est le parti de l’idéal et un idéal, c’est plus difficile à vendre que simplement le tracé de l’autoroute », a-t-il continué, en économisant ses mots, tant il était essoufflé.
« Joignons nos forces. Si tous les indépendantistes font front commun, on va gagner », a affirmé l’ancien chef du PQ.
Depuis sa résidence ancestrale de Verchères, en Montérégie, qu’il chérissait beaucoup, il est revenu sur ses combats, mais aussi ses réussites et ses déceptions.
LÉVESQUE, BOUCHARD ET PARIZEAU
M. Landry n’a pas hésité à rendre hommage aux leaders qu’il a côtoyés. Au premier rang se trouvait son « idole » René Lévesque, avec qui il a travaillé jusqu’à la mort de celui-ci.
Ce contact avec le fondateur du Parti québécois reste l’un de ses plus beaux souvenirs, a-t-il raconté.
« J’ai mangé avec lui une semaine avant sa mort. […] Cet homme était vraiment extraordinaire. Son oeuvre doit être terminée. Pas juste en nommant des boulevards et des ponts, mais en faisant l’indépendance. »
Il a aussi eu des bons mots pour Lucien Bou- chard, « un homme extraordinaire, un homme de culture, d’honnêteté qui vient d’une région extrêmement sympathique. J’ai été fier et heureux de travailler avec lui ».
« J’ai adoré [servir sous Jacques Parizeau], a ajouté le politicien respecté. Un être intelligent. »
M. Landry a d’ailleurs profité du moment pour démentir une rumeur voulant qu’il ait demandé à M. Parizeau de démissionner.
« Jamais ! Moi, j’ai dit à M. Parizeau : “Jusqu’à la fin, si vous restez, je vous appuie.” »
ÉTERNEL OPTIMISTE
M. Landry s’est aussi exprimé sur quelques déceptions, comme le référendum « volé » de 1995 ou son départ du PQ en juin 2005.
« C’était très difficile, a-t-il rappelé, évoquant sa démission. Ça m’a fendu le coeur, mais je l’ai fait pour servir la nation, faire passer les intérêts du Québec avant les miens. »
Il a également évoqué le souvenir de son épouse décédée.
« Perdre Lorraine, je ne me suis jamais relevé […] Heureusement que la vie m’a donné Chantal [Renaud] », a-t-il dit.
À quelques jours de son décès, il disait ne pas avoir peur de la mort.
« Personne n’y échappe », a-t-il soufflé.