Mes voitures de rêve sont achetables
Il existe une différence très nette entre fantasme et rêve. Le premier a forcément quelque chose d’excessif, irréel ou inatteignable. Pensez aux images des actrices Salma Hayek, Scarlett Johansson ou Charlize Theron, qu’on retrouve partout. Des exemples qu’on ajuste à ses propres références, bien sûr. Tant mieux si c’est George Clooney, Brad Pitt ou Claude Legault pour vous.
Le rêve, c’est autre chose. C’est la copine, la voisine ou l’inconnue qu’on aimerait connaître beaucoup mieux. Elle est aussi jolie, aussi fascinante et beaucoup plus réelle que les stars. Idem au masculin. Mais surtout, la rencontre est possible alors qu’elle tiendrait du miracle avec les beautés virtuelles. Vous pourriez même aller au cinéma ensemble.
Pour parler automobile, puisqu’on est là pour ça, j’étais envoûté tout jeune par les Chaparral, Ferrari P3/4 et Ford GT aperçues dans les magazines. Aussi par la splendide Jaguar E-type et la stupéfiante Lamborghini Miura.
Pourtant, ma voiture de rêve était une modeste Ford Escort. Eh oui. Mais pas n’importe laquelle : la Twin Cam, dotée d’un quatre cylindres de 1,6 litre créé par le grand motoriste Cosworth. Elle venait succéder à la Cortina Lotus du même constructeur, maintes fois pilotée par de grands champions tels que Jackie Stewart, Jackie Ickx et surtout Jim Clark. La Cortina Lotus est encore redoutable, aujourd’hui, dans les épreuves pour voitures classiques.
Nul besoin de dépenser une fortune pour goûter des performances, un comportement et un plaisir de conduire relevés.
LES LEÇONS SPECTACULAIRES DU RALLYE
Les succès honnêtes des Cortina en rallye ont vite été surpassés par les exploits de l’escort et de ses héritières. Y compris le tout premier titre pour les pilotes en Championnat du monde des rallyes, décroché en 1979 par le Suédois Björn Waldegård peu après sa victoire au troisième et dernier Critérium du Québec. Avec un premier titre mondial des constructeurs pour Ford.
J’ai vu Waldegård et son copilote Hans Thorszelius dévorer furieusement une « spéciale » chronométrée, courue à la pointe de L’île-des-soeurs, en dérapage continu, dans une Escort RS1800 qui projetait d’immenses gerbes de terre et de gravier. C’était hallucinant, et inoubliable.
Vingt ans plus tard, je me suis retrouvé en Italie, invité par Ford à suivre, sur place et en direct, une des spéciales du rallye Sanremo, couru sur des routes asphaltées incroyablement étroites et entortillées. Notre petit groupe avait pu observer l’équipe à l’oeuvre de l’intérieur et même jaser tranquillement avec le grand Colin Mcrae, champion du monde 1995, qui pilotait une des voitures. Rencontre tout aussi inoubliable.
Ces machines étaient basées sur la compacte Focus que Ford venait alors tout juste de lancer. Elles étaient propulsées par un quatre cylindres turbocompressé de 2,0 litres qui devait officiellement produire un maximum de 300 chevaux.
Dans les faits, on tolérait 350 chevaux pour ces bolides à rouage intégral d’environ 1250 kilos, abaissés de 40 mm, chaussés de pneus lisses et dotés de freins Brembo encore plus grands, pour mieux dompter le bitume. Ces Focus WRC valaient trois quarts de millions de dollars chacune et je rêvais d’en piloter une plus que n’importe quelle exotique. À part la fabuleuse Mclaren F1, mettons.
EXCEPTIONNELLES DE SÉRIE
Parce que l’idée d’une petite voiture modifiée avec brio, qui se moque de rivales plus chères, grosses et puissantes, me réjouit encore totalement. Et le bonheur, c’est de constater qu’on peut s’offrir quelques-unes de ces merveilles à prix infiniment moindre qu’une Focus WRC, avec un équipement complet, une soute cargo convenable et une garantie.
Je l’ai réalisé à nouveau lorsque mon excellent collègue Costa Mouzouris m’a invité à l’autodrome St-eustache où son ami Carl Wener célébrait son anniversaire en offrant à ses amis de conduire ses propres sportives. C’est précieux, un ami comme Carl. J’ai pris grand soin et grand plaisir à piloter sa BMW M3, sa Porsche 911 GT3 et sa Micra préparées pour la course.
Je suis cependant resté estomaqué par ma première sortie, au volant de sa Honda Civic Type R de pure série. Son aplomb, sa précision et les performances de son quatre cylindres turbo de 306 chevaux sont tels, sans parler des sièges et d’une boîte manuelle irréprochables, que je verrais facilement mon nom sur l’immatriculation. Malgré sa silhouette de transformer.
Même révélation un mois plus tard, en bouclant quelques tours de circuit à Mosport, au volant d’une Volkswagen Golf R, pendant les essais annuels de L’AJAC. Finesse, agilité et dérives des quatre roues à volonté, dans une compacte à rouage intégral merveilleusement raffinée de 292 chevaux. « On signe où ? » ai-je aussitôt pensé.
Les Subaru WRX et STI sont toujours de solides références et il faut considérer la nouvelle Hyundai Veloster N de 275 chevaux, dont la tenue de route s’aiguise à mesure qu’on la pousse, grâce à son différentiel autobloquant. Moins chère, aussi.
Chose certaine, nul besoin de dépenser une fortune pour goûter des performances, un comportement et un plaisir de conduire relevés et parfaitement adaptés au monde réel. Vous pourrez même inviter des amis à venir faire un tour, ou plus. À St-eustache, ou ailleurs.