Le Journal de Quebec

Plus de 92 % des offres d’emplois cherchent des unilingues au pays

Au Québec, 26 % des emplois exigent le bilinguism­e, selon le site d’emplois Indeed

- FRANCIS HALIN

Le Canada est loin d’être un pays bilingue si l’on se fie aux offres d’emplois d’indeed, qui démontrent qu’à peine 8 % des postes requièrent le bilinguism­e, révèle une analyse de la firme obtenue par Le Journal.

« C’est un désastre pour le développem­ent du français au Canada », se désole le professeur de gestion et de droit à l’université d’ottawa Gilles Levasseur.

En gros, le site Indeed a épluché toutes ses offres d’emplois qui « exigent de parler plus d’une langue ou mentionnen­t une préférence pour des candidats bilingues ».

Résultat, dans l’ensemble du pays, un maigre 8 % d’entre elles exigent le bilinguism­e. Au Québec, ce chiffre bondit à 26 %, correspond­ant à un peu plus d’un emploi sur quatre.

Dans la plupart des cas, les postes qui demandent de pouvoir s’exprimer dans plus d’une langue sont liés au service à la clientèle des entreprise­s.

COMPÉTENCE RECHERCHÉE

Au Québec, un chercheur d’emploi qui n’est pas bilingue se coupe du quart des postes sur le marché du travail, ce qui est loin d’être négligeabl­e, observe Indeed.

« Ce 26 % est un chiffre important. Cette demande pour des compétence­s en bilinguism­e varie énormément d’ailleurs d’un métier à l’autre », analyse Brendon Bernard, l’économiste du Indeed Hiring Lab, qui a réalisé l’étude.

En comparaiso­n, en Ontario, 5 % des offres d’emplois lorgnent des candidats bilingues, un chiffre qui fond à moins de 2 % dans l’ouest canadien.

Pire encore, en Colombie-britanniqu­e, moins de 1 % des offres d’emplois publiées requièrent la connaissan­ce d’une deuxième langue.

POUVOIR ÉCONOMIQUE

Pour le professeur Gilles Levasseur, ce nouveau portrait du marché de l’emploi n’augure rien de bon pour les francophon­es.

Selon lui, le français doit être plus qu’un « outil de socialisat­ion ».

M. Levasseur pense que les politicien­s et les dirigeants d’entreprise­s ont leur rôle à jouer pour valoriser le français au travail.

« On ne peut pas se permettre que la langue soit seulement un outil culturel. Une langue vit et prospère parce qu’elle a une valeur économique », insiste M. Levasseur.

Le professeur à l’école de Gestion Telfer estime que le français doit être la langue de la finance pour qu’elle puisse parler « performanc­e » et « rendement » au sein des sociétés.

ANGLICISAT­ION LENTE

Joint par Le Journal, le président de la Société Saint-jean-baptiste, Maxime Laporte, a dénoncé « la bilinguisa­tion du monde du travail, de nos institutio­ns et de l’espace public, qui n’est autre (chose) qu’un premier stade d’anglicisat­ion ».

De son côté, le professeur de gestion des ressources humaines à l’école des sciences de la gestion de L’UQAM, Denis Morin, a rappelé que l’anglais domine partout.

« La langue d’affaires, c’est l’anglais. C’est à travers le monde », a-t-il dit.

Le spécialist­e en recrutemen­t de personnel a ajouté que l’asie ne tardera pas elle aussi à imposer ses langues dans nos sphères économique­s.

« Avec la Chine qui s’en vient, dans quelques années, on n’aura bientôt pas le choix de transiger en mandarin », a-t-il conclu.

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PHOTO D’ARCHIVES, STEVENS LEBLANC La Foire de l’emploi de Québec a attiré de nombreux visiteurs en avril dernier, comme ce couple devant un babillard d’emplois.

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