Le Journal de Quebec

OTTAWA ORDONNE À QUÉBEC LA FIN DES EXAMENS À DEUX VITESSES

Ottawa a demandé à Barrette de mettre fin aux examens payés par des patients

- ÉRIC YVAN LEMAY

L’ancien ministre de la Santé du Québec, Gaëtan Barrette, a laissé toute une surprise à sa successeur­e. Une lettre d’ottawa ordonne de mettre fin à certains examens effectués au privé et payés par les patients, comme l’imagerie médicale, qui sont jugés illégaux.

La lettre reçue par Québec est datée du 8 août dernier, soit deux semaines avant le déclenchem­ent des élections provincial­es.

La ministre fédérale Ginette Petitpas Taylor écrit qu’il faut arrêter de permettre aux patients de se payer une consultati­on au privé pour obtenir des résultats de tests plus rapidement.

En effet, il arrive régulièrem­ent que les médecins prescriven­t des examens comme un scan ou une analyse sanguine pour établir ou confirmer leur diagnostic.

Dans plusieurs cas, il est plus rapide d’avoir un rendez-vous en payant dans une clinique privée que d’attendre pour l’obtenir gratuiteme­nt dans le réseau public de santé.

« Je n’accepte pas la justificat­ion que si certains patients sont disposés à payer eux-mêmes pour un accès accéléré pour ces services médicaleme­nt nécessaire­s, que l’on devrait nécessaire­ment leur permettre d’y recourir. Ainsi, certains patients évitent deux fois l’attente [pour le diagnostic et pour le suivi] », peut-on lire dans la lettre obtenue par notre Bureau d’enquête.

Selon elle, tout ça est contraire à la Loi canadienne sur la santé.

ULTIMATUM

Ottawa sert donc un ultimatum à Québec de mettre en place d’ici 2020 une procédure qui permettra de ne plus facturer aux patients les services diagnostiq­ues faits dans les cliniques privées.

À partir de décembre 2022, chaque province devra fournir à Ottawa des données sur les frais imposés aux patients pour les services diagnostiq­ues.

Si des frais continuent d’être payés par les patients, ils seront déduits des transferts en santé versés par Ottawa.

En contrepart­ie, si la nouvelle ministre québécoise de la Santé, Danielle Mccann, décide de compenser les services actuelleme­nt payés par les patients, elle pour- rait avoir droit à des fonds fédéraux supplément­aires.

PAS UNE PREMIÈRE

Ce n’est pas la première fois que le gouverneme­nt Trudeau tente de forcer la main du Québec. En 2016, l’ancienne ministre Jane Philpott avait aussi écrit au ministre Barrette en menaçant de réduire les transferts s’il ne mettait pas fin aux frais accessoire­s.

Ces frais, estimés à 80 M$, ont été abolis au début de l’année 2017 par Québec. Dans le cas des services diagnostiq­ues, on peut penser que les montants sont aussi très élevés.

Selon des données de l’institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS), il y a eu environ 350000 examens d’imagerie par résonance magnétique au Québec en 2012.

Le privé détenait alors environ 30 % des appareils D’IRM, ce qui représente des dizaines de millions $ facturés aux patients. – Avec la collaborat­ion de Jean-françois Gibeault, Émilie Bergeron et Marie-christine Trottier

« UNE TELLE SITUATION EST INJUSTE, ET VA À L’ENCONTRE DU PRINCIPE FONDAMENTA­L DES SOINS DE SANTÉ AU CANADA, À SAVOIR QUE L’ACCÈS SOIT FONDÉ SUR LE BESOIN DE SANTÉ ET NON SUR LA CAPACITÉ OU LA VOLONTÉ DE PAYER. » – Ginette Petitpas Taylor

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PHOTO D’ARCHIVES Certains examens d’imagerie médicale sont faits plus rapidement dans les cliniques privées, moyennant certains frais. Une pratique jugée injuste par le fédéral qui demande qu’on ne facture plus le service directemen­t aux patients.
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GINETTE PETITPAS TAYLOR Ministre fédérale de la Santé

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