Vers une nouvelle apocalypse ?
Le 100e anniversaire de l’armistice est un bon moment pour méditer sur la direction qu’emprunte notre monde.
Le président de la France, Emmanuel Macron, déclarait récemment :
« Je suis frappé par la ressemblance entre le moment que nous vivons et celui de l’entre-deuxguerres. Dans une Europe qui est divisée par les peurs, le repli nationaliste, les conséquences de la crise économique, on voit presque méthodiquement se réarticuler tout ce qui a rythmé la vie de l’europe de l’après-première Guerre mondiale à la crise de 1929. »
Le propos a soulevé un vif débat : a-t-il raison, a-t-il tort, jusqu’à quel point et, surtout, quoi faire ?
COMPARAISON
Les différences entre cette époque et aujourd’hui sautent aux yeux.
Trump ou Salvini ne sont ni Hitler ni Mussolini : ils sont incultes et grossiers, mais ne sont porteurs d’aucune idéologie d’expansion territoriale par les armes.
Dans les années 1930, les chômeurs se comptaient par dizaines de millions. Aujourd’hui, on trouve du travail si on le veut vraiment.
Le traité de Versailles de 1919, injuste et revanchard, humilia et enragea l’allemagne. Rien de tel aujourd’hui.
L’antisémitisme existe encore, relève la tête, mais n’est pas aussi ouvertement militant que dans les années 1930.
Les tensions causées aujourd’hui par l’immigration n’étaient pas un enjeu à cette époque.
Par contre, aujourd’hui comme jadis, la classe politique traditionnelle est bousculée par de nouvelles forces plus dures.
En 1932, l’autrichien Stefan Zweig écrivait :
« Dans toutes les nations ou presque se manifestent les mêmes phénomènes de forte et brusque irritabilité malgré une grande lassitude morale, un manque d’optimisme, une méfiance prête à s’éveiller en toute occasion, et la nervosité, l’humeur chagrine qui résulte du sentiment d’insécurité. […] On ajoute foi aux mauvaises nouvelles plus facilement qu’à celles qui rendent espoir, et les individus autant que les États, plus qu’à d’autres époques du passé, semblent prêts à se haïr. »
Avouons que ces lignes auraient pu être écrites aujourd’hui.
Alors, que faire ? S’il y avait des solutions simples, on les aurait trouvées.
La pire chose à faire est ce que MM. Macron et Trudeau font à temps plein : incapables de penser un monde complexe, ils le représentent en noir et blanc.
Incapables de penser un monde complexe, ils le représentent en noir et blanc.
CONDESCENDANCE
D’un côté, les bons, ceux qui pensent comme eux : multiculturalistes, cosmopolites, condescendants, riches, donc capables de ne prendre que les bons côtés du monde actuel.
De l’autre côté, les mauvais, les « fermés », les « réactionnaires » : les gens attachés à leurs traditions, leur mode de vie, leurs valeurs, leur sécurité, accueillants tant qu’ils se sentent respectés.
Ceux-là ne méritent que le mépris, la désapprobation, les leçons de morale et les relectures tronquées du passé.
Excédés, ils se tournent alors vers des leaders qui promettent de faire table rase et de distribuer des coups de pied au cul.
Le passé et le présent ont surtout cela en commun : on récolte ce que l’on sème.