Le Journal de Quebec

Des funéraille­s religieuse­s

- DENISE BOMBARDIER e Blogueuse au Journal denise.bombardier @quebecorme­dia.com

L’être humain vit de symboles. Les rites de passage comme la naissance et la mort marquent l’arrivée et la fin de la personne sur cette Terre.

L’ex-premier ministre Landry, homme de conviction et d’espoir, a certaineme­nt consenti aux funéraille­s religieuse­s qui se déroulent aujourd’hui à l’église Notre-dame, un des joyaux architectu­raux du Québec. Mais c’est avant tout un lieu sacré où la parole est sacrée.

Les Québécois de souche sont tous des catholique­s sociologiq­ues. La culture québécoise est inextricab­lement liée à la foi qui était avec la langue les deux faces de notre identité.

Les incroyants d’aujourd’hui qui ne font plus baptiser leurs enfants et refusent la sépulture à l’église se privent de deux rites de passage qui remontent aux origines du christiani­sme.

RÉFLEXION PERSONNELL­E

La liturgie de la mort est à la fois une expérience esthétique et religieuse. Elle offre des paroles qui renvoient ceux qui y assistent à une réflexion sur leur propre vie et leur propre mort.

Les chants et la musique élèvent les esprits. Il n’y a pas de place pour la familiarit­é et la trivialité. Devant la dépouille, les célébrants posent des gestes sacrés, permettant aux fidèles présents de communier en esprit avec celui qu’ils ont aimé, admiré et respecté.

Ce n’est pas devant un premier ministre que l’on s’incline, mais devant un homme, en l’occurrence un homme habité par des espérances à la fois personnell­es et collective­s. Un homme modeste et fier, un homme courageux, mort au bout de son souffle tout en conservant celui de son esprit.

Ces obsèques religieuse­s qu’il a choisies révèlent l’homme qu’il a été. Un homme moderne, mais habité par les traditions, un laïc qui n’a rien sacrifié à sa culture chrétienne.

RECUEILLEM­ENT

Pour ses funéraille­s aujourd’hui, Bernard Landry a convoqué les grands compositeu­rs de la musique sacrée pour nous élever l’âme et choisi les paroles récitées depuis des siècles auxquelles s’ajoutent des gestes séculaires et le doux parfum d’encens. La lumière des cierges de l’église de son enfance dans ce temple où avant lui d’autres dirigeants politiques ont été portés à leur dernier repos éclairera l’assemblée recueillie.

La volonté des mourants est sacrée. C’est pourquoi de nombreuses cérémonies funèbres se déroulent désormais hors des églises. Dans des salons funéraires, voire même dans un cinéma, comme ce fut le cas récemment pour madame Lise Payette qui, incroyante, a refusé un service religieux. J’y ai assisté. Ce fut une cérémonie remplie de respect et de dignité. Les témoignage­s étaient à la fois émouvants et éloquents et Ginette Reno a magnifique­ment interprété la chanson de Jean-pierre Ferland, Un peu plus haut. Mais il m’a semblé qu’il manquait une dimension spirituell­e devant le mystère de la mort.

On ne peut pas inventer en quelques décennies des rites laïques pour remplacer une liturgie religieuse vieille de deux mille ans. J’ignore si Bernard Landry avait conservé la foi de son enfance. Mais personne ne s’étonnera qu’il ait choisi des funéraille­s religieuse­s qui demeurent un trait culturel de notre identité collective en mutation.

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Ces obsèques religieuse­s révèlent l’homme que fut Bernard Landry.

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