Le Journal de Quebec

Deux fois plus de médecins au privé depuis cinq ans

Les docteurs sont désormais 425 à avoir délaissé le régime public au Québec

- HÉLOÏSE ARCHAMBAUL­T

Le nombre de médecins québécois qui travaillen­t au privé a plus que doublé depuis cinq ans dans la province. Un virage lié aux mauvaises conditions dans le public, selon plusieurs.

« C’est sûr qu’il y a une tendance de fond qui se répète d’année en année », constate le Dr Louis Godin, président de la Fédération des médecins omnipratic­iens du Québec (FMOQ).

En date du 20 septembre, un total de 425 médecins étaient désaffilié­s du régime public, selon la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ).

Il y a cinq ans, ils étaient deux fois moins nombreux (210) à avoir fait ce choix ( voir tableau).

« Ça devient angoissant, réagit la Dre Isabelle Leblanc, du regroupeme­nt Médecins québécois pour le régime public (MQRP). Ça augmente de plus en plus et rien n’est fait pour comprendre pourquoi [ils partent] et ainsi les empêcher de se désaffilie­r. »

Même s’ils représente­nt encore une part marginale de leur confrérie (2,1 %), le phénomène est en constante progressio­n depuis l’an 2000. À cette époque, 18 médecins travaillai­ent au privé.

La majorité des profession­nels désaffilié­s sont des omnipratic­iens (305). Considéran­t qu’ils suivent en moyenne 1000 patients, ce sont 300 000 Québécois qui sont privés d’un suivi gratuit.

MAUVAISES CONDITIONS

Selon la FMOQ et la Fédération des médecins spécialist­es du Québec (FMSQ), les nombreux changement­s dans le système depuis cinq ans en ont poussé plusieurs à quitter la RAMQ.

« Il ne faut pas se le cacher, la réforme a été extrêmemen­t dure pour les médecins, réagit la Dre Diane Francoeur, présidente de la FMSQ. […] On est incapables de travailler comme on le souhaitera­it. C’est extrêmemen­t frustrant. »

« Au coeur de mes préoccupat­ions, c’est le patient. Et je sens que j’aide énormément de gens », dit la Dre Sarah Benalil, qui a choisi le privé à la fin de ses études.

Président d’un réseau de cliniques privées, le Dr Marc Lacroix pense aussi que le mauvais climat en a convaincu plusieurs.

« On n’a rien vu encore dans le privé, c’est le début d’une nouvelle façon de voir les choses. D’ici cinq à dix ans, il n’y aura plus de culpabilit­é. Les médecins iront où ils veulent. »

REVENIR AU PUBLIC ?

Du côté des syndicats, on garde espoir que de meilleures conditions en convainque­nt plusieurs d’y revenir.

« Ça ne se fera pas dans un an, concède le Dr Godin. […] Mais il faut souhaiter que ça s’amenuise et que [le privé] redevienne une exception. »

 ?? PHOTO STEVENS LEBLANC ?? Omnipratic­ienne depuis 2016, Sarah Benalil, âgée de 39 ans, a choisi d’aller travailler dans une clinique privée à la fin de ses études. Parmi les avantages, elle a pu avoir un poste à Québec et elle dit avoir plus temps pour bien soigner ses patients.
PHOTO STEVENS LEBLANC Omnipratic­ienne depuis 2016, Sarah Benalil, âgée de 39 ans, a choisi d’aller travailler dans une clinique privée à la fin de ses études. Parmi les avantages, elle a pu avoir un poste à Québec et elle dit avoir plus temps pour bien soigner ses patients.

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