Le pot de « qualité moyenne » à la SQDC
Les produits sont trop chers et les quantités parfois erronées, relèvent deux experts interrogés par Le Journal
Mauvaise quantité, fleurs séchées écrasées ou trop sèches… la Société québécoise du cannabis ne réussira pas à attirer les grands consommateurs de cannabis si elle continue d’offrir des produits de qualité moyenne vendus trop cher, estiment deux experts.
À l’ouverture de ses 12 boutiques, la SQDC promettait environ 150 produits provenant de six producteurs différents. Finalement, certaines succursales avaient la moitié moins de marchandises à leur ouverture.
Un mois plus tard, les longues files d’attente ont eu raison des stocks, et les boutiques doivent fermer trois jours sur sept. Le site web n’est guère plus garni, avec parfois moins d’une dizaine de produits offerts.
Les commentaires des utilisateurs se sont multipliés sur les produits et sur les prix.
Le Journal s’est donc entretenu avec un maître cultivateur et un consultant en production horticole pour qu’ils testent une dizaine de produits de l’ensemble des fournisseurs de la société d’état ( voir encadré).
« Je classerais les variétés en SQDC comme étant de qualité moyenne… un peu comme en 2005, où le marché illégal n’était pas très évolué », explique José Dominguez, maître cultivateur et cofondateur de Canveda, un producteur autorisé. Il est le cultivateur privé le plus décoré au Canada, avec 43 Cannabis Awards.
Si les connaisseurs sont déçus, un consommateur occasionnel devrait toutefois trouver son compte à la SQDC.
Le service à la clientèle y est évidemment mieux que dans un parc, où il n’y a aucun contrôle de qualité ou de poids.
TROP SEC
Les variétés de cannabis que se sont procurées les experts du Journal étaient toutes trop sèches, au point où certaines fleurs séchées s’effritaient simplement en les frottant entre les doigts.
« Ils étaient tous en bas de 1 % d’humidité, tandis qu’on vise généralement entre 6 et 8 % », affirme William Fournier, consultant en production horticole chez Agro-biotech, un producteur autorisé québécois qui attend encore sa licence de vente.
Outre les questions environnementales associées au suremballage, un contenant trop grand assèche le cannabis parce qu’il contient trop d’air.
C’est particulièrement le cas des contenants HEXO de 3,5 g, qui pourraient facilement en contenir le double.
Si le produit est trop sec, on perd des terpènes, c’est-à-dire les huiles essentielles du cannabis qui donnent les arômes et les odeurs, poursuit l’expert.
Les terpènes jouent aussi un rôle dans l’effet psychologique que procure une variété.
TROP CHER
Ainsi, étant donné la qualité moyenne du cannabis, les prix ne sont pas si intéressants, croit M. Dominguez, qui a notamment payé 151 $ pour 15 g de Rockstar. Sur le marché noir, on peut trouver de la qualité équivalente pour la moitié de ce prix.
« Les connaisseurs s’intéressent à la qualité. Et là, on vend de la qualité moyenne au plein prix, dit M. Dominguez. Les prix semblent avoir été établis en fonction du taux de THC, mais ce n’est pas néces- sairement un indicateur de la qualité du cannabis. »
OPTIMISTES
Les deux experts demeurent toutefois optimistes.
« Beaucoup de producteurs sont en train de se faire la main et d’apprendre à cultiver de façon optimale, explique M. Fournier. Certains produits ont des génétiques incroyables, mais qui ne sont pas à la pleine réalisation de leur potentiel. Mais je suis sûr qu’ils vont s’améliorer. »
« Les producteurs doivent encore déterminer leur recette gagnante, autant en culture que dans le choix génétique pour identifier quels produits seront les plus populaires, pour qu’ils puissent les vendre à des prix plus compétitifs », ajoute M. Dominguez.