État de choc chez Bombardier
Entrevue avec le PDG Alain Bellemare
Le PDG de Bombardier, Alain Bellemare, assure qu’il n’a pas vu venir les problèmes financiers qui ont fait plonger l’action de l’entreprise. Il se défend d’avoir tenté de faire de l’argent à l’aide d’information privilégiée.
Encore hier, le titre de Bombardier a largué 20 % à la Bourse de Toronto, ce qui porte à 70 % sa dégringolade depuis le sommet récent de 5,58 $, atteint en juillet.
Recevant Le Journal dans son bureau du 30e étage d’une tour du centre-ville de Montréal, M. Bellemare accuse le coup.
« C’est incroyable que le marché ait perdu autant confiance à cause des résultats d’un seul trimestre, lâche-t-il. Ce qui se passe présentement, ce n’est pas normal. »
L’homme de 57 ans admet que Bombardier en a déçu plusieurs en dévoilant un trou imprévu de 600 M$ US dans sa trésorerie à cause de retards dans la division ferroviaire. Mais il peine à comprendre que les investisseurs se montrent scep- tiques quand il martèle que ses objectifs demeurent intacts pour 2020 : générer des liquidités d’au moins 750 M$ US.
Cette semaine, Alain Bellemare a multiplié les rencontres pour rassurer les investisseurs, mais sans grand succès jusqu’ici.
AMF : « ÇA NE NOUS AIDE PAS »
Il faut dire que Bombardier a reçu un autre coup dur jeudi quand l’autorité des marchés financiers (AMF) a lancé un examen sur la mise en place, en août, d’un programme qui a permis à plusieurs hauts dirigeants de vendre des actions avant la chute du cours de l’entreprise.
« Ce genre de nouvelle là, c’est sûr que ça ne nous aide pas », laisse tomber le PDG. Mais il ajoute aussitôt : « Je n’en veux pas à L’AMF, je pense qu’ils font juste leur job. »
A-t-on instauré le programme pour vendre des titres avant la chute boursière de l’automne ?
« On n’aurait jamais fait ça, répond M. Bellemare. On est bien trop professionnels et éthiques pour ça. »
Était-il au courant du trou de 600 M$ US en août ?
« Les problèmes de cash flow sont arrivés tard dans le mois de septembre et c’était une surprise, énonce-t-il. On n’était pas contents de ça, mais ce n’est pas non plus anormal pour une entreprise de notre taille. Quand tu manques deux ou trois projets, ça peut représenter 300 M$ US. »
Alain Bellemare refuse de dire combien d’actions appartenant à 12 des plus hauts dirigeants de Bombardier ont été vendues depuis septembre par le biais du programme spécial.
RÉPONSE AU PRINTEMPS
Il faudra attendre au printemps prochain pour le savoir. L’AMF a ordonné la suspension du programme.
À cause de sa dette de plus de 9 G$ US, Bombardier est plus vulnérable que bien d’autres entreprises. Mais contrairement à 2015, alors que la faillite guettait, M. Bellemare croit que l’entreprise a suffisamment de fonds pour survivre.
« C’est sûr que j’aimerais mieux qu’on ne soit pas dans cette situation, mais je suis encore très confiant qu’on a le bon plan de redressement et qu’on va y arriver », dit-il.
« JE TROUVE ÇA DUR PARCE QUE ÇA ME TIENT À COEUR. JE SUIS SUPER SENSIBLE ET JE VEUX QU’ON RÉUSSISSE » – Alain Bellemare, PDG de Bombardier