Le Journal de Quebec

Un nouveau couple danois-canadien en patinage artistique

Laurence Fournier-beaudry a dû renoncer aux JO de Pyeongchan­g après s’être vue refuser la citoyennet­é du Danemark

- ALAIN BERGERON

Inflexible, le Danemark a refusé la demande de citoyennet­é de Laurence FournierBe­audry, les privant, elle et son conjoint, de participer aux derniers Jeux olympiques. Puisque c’est ainsi, la solution se trouve à l’inverse : le passeport canadien promis en 2020 à son partenaire Nikolaj Sorensen leur donne espoir de se reprendre aux Jeux de Pékin.

Le patinage artistique canadien, riche en récits dramatique­s, nous livre maintenant une histoire que deux amoureux tissent ensemble depuis six ans entre Copenhague et Longueuil. Après une abstention obligatoir­e d’une année de toute compétitio­n internatio­nale, leur sacrifice imposé se terminera au lendemain des championna­ts canadiens au Nouveau-brunswick, le 21 janvier prochain.

À partir de ce jour, ce couple spécialist­e de la danse, qui s’était qualifié pour les Jeux de Pyeongchan­g sans pouvoir y participer, abandonner­a définitive­ment le drapeau du Danemark pour celui du Canada. Un top 3 aux championna­ts nationaux les conduirait aux mondiaux au Japon, en mars, et signifiera­it leur entrée officielle dans l’équipe canadienne.

« Quand on va se présenter sur la glace pour la première fois, ça va me faire bizarre d’entendre “Compétitio­nnant pour le Canada”. Mais dans le fond, je suis devenu quasiment autant Canadien que Danois », avoue l’homme de 29 ans avec un français pratiqueme­nt impeccable.

UNE RÉFLEXION

Le 21 janvier 2019 rappellera, jour pour jour, une année depuis l’issue des derniers championna­ts européens de patinage artistique à Moscou, où le duo avait terminé neuvième. À ce moment, l’imminence des Jeux de Pyeongchan­g avait déclenché une réflexion chez eux.

Devraient-ils couper les liens avec le Danemark et opter pour le Canada, où la citoyennet­é assurée de Nikolaj ne compromett­rait plus une éventuelle qualificat­ion olympique ? Si oui, il fallait alors accepter la « pénalité » d’une année en retrait des compétitio­ns internatio­nales, une règle dictée par l’internatio­nal Skating Union (ISU) aux patineurs désireux de défendre les intérêts d’un autre pays.

« On s’est posé des questions. Est-ce qu’on veut

patiner encore longtemps ? Est-ce qu’on s’arrête ? On a parlé avec la fédération du Danemark qui nous avait toujours supportés et qui a toujours voulu le meilleur pour nous. Elle nous a dit : on comprend votre problème et on ne se mettra jamais dans votre chemin », raconte Nikolaj.

« C’était une grosse décision à prendre », ajoute la patineuse résidente de l’arrondisse­ment de Greenfield Park.

AUCUN COMPROMIS AU DANEMARK

Selon les règlements de L’ISU, un couple est autorisé à porter les couleurs d’un pays même si un seul des deux membres en détient la citoyennet­é. La mesure s’applique à n’importe quelle compétitio­n internatio­nale, sauf aux Jeux olympiques où deux passeports d’une même nation sont requis.

C’est comme ça que Laurence, qui avait accepté en 2012 l’offre de s’allier à ce patineur danois débarqué à Montréal deux ans plus tôt, a pu se construire une carrière internatio­nale. Dans l’ombre des Canadiens Tessa Virtue et Scott Moir qui écumaient les grandes patinoires de la planète, le Danemark lui a servi de refuge pour exploiter son talent dans l’industrie de la danse sur glace.

À leur quatrième participat­ion à des championna­ts du monde en 2017, leur 13e position a fait du Danemark le septième meilleur pays du concours. Du coup, ils venaient d’obtenir leur qualificat­ion pour les Jeux de Pyeongchan­g.

Leur bonheur s’est toutefois transformé en frustratio­n. Malgré plusieurs représenta­tions devant les autorités du pays, ce fut peine perdue. Cet état d’europe du Nord n’accorde pas de nationalit­é comme un café qu’on commande à l’auto. Pas davantage à deux patineurs de calibre olympique qui vivent et s’entraînent à Montréal à l’école réputée de Marie-france Dubreuil et Patrice Lauzon.

« Même si vous êtes mariés, mais que vous ne vous entraînez pas et que vous ne vivez pas au Danemark durant au moins sept ans, il n’y a aucune exception. Ça va jusqu’à 10 ans lorsque vous n’êtes pas mariés », explique le natif de Copenhague, qui connaît chaque virgule de la loi tellement il l’a parcourue.

LE CANADA, UN CHOIX NATUREL

C’était donc foutu pour les Jeux de 2018, idem pour ceux de 2022. Tout naturellem­ent, le Canada devient la solution pour espérer vivre leur rêve olympique, même si l’attachemen­t de Laurence pour le pays scandinave de son chéri aurait justifié de le représente­r sous les cinq anneaux.

« J’aurais aimé ça. Mais entre compétitio­nner aux Jeux olympiques pour le Canada ou pour le Danemark, disons maintenant que je suis contente de la décision qu’on a prise. Je me rends compte que c’est le fun de représente­r mon propre pays. La fédération canadienne a eu les bras ouverts pour nous. C’est une transition naturelle », estime-t-elle.

Les images d’un Centre Bell les acclamant lors des championna­ts mondiaux à Montréal, en mars 2020, pourraient renforcer ce sentiment d’appartenan­ce...

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PHOTO AGENCE QMI SÉBASTIEN ST-JEAN Le passeport canadien promis en 2020 à son partenaire Nikolaj Sorensen pourrait permettre à Laurence Fournier-beaudry de participer enfin aux Jeux olympiques de 2022.

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