Le Journal de Quebec

Les jeunes adultes en surpoids plus à risque

L’incidence et la mortalité associées au cancer colorectal sont en hausse constante chez les jeunes adultes. Les résultats d’une étude récente indiquent qu’un des coupables de cette nouvelle tendance est l’augmentati­on du taux de surpoids dans cette popul

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CANCERS PRÉCOCES

Les cancers du côlon et du rectum représente­nt la deuxième cause de décès par cancer au Canada, étant responsabl­es à eux seuls d’environ 12 % de la mortalité liée à cette maladie. Ces cancers touchent préférenti­ellement les personnes âgées, avec 90 % des cas qui sont diagnostiq­ués après l’âge de 50 ans. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il est généraleme­nt recommandé d’attendre cet âge avant de faire la coloscopie de dépistage, à moins d’avoir un historique familial de cancer du côlon.

Au cours des dernières années, par contre, une nouvelle tendance semble se dessiner : alors que l’incidence de ces cancers est globalemen­t à la baisse en Amérique du Nord, le nombre de personnes jeunes qui sont touchées par un cancer colorectal est au contraire en constante augmentati­on. Par exemple, une étude réalisée par l’american Cancer Society a montré que chez les jeunes adultes âgés de 20 à 30 ans, l’incidence du cancer du côlon a augmenté de 1-2 % par année entre 1990 et 2013 (1). La situation est encore pire pour le cancer du rectum, avec une hausse annuelle de 3 % au cours de cette période. En pratique, cela signifie qu’une personne âgée de 20 à 30 ans (née dans les années 1990) a actuelleme­nt deux fois plus de risque d’être touchée par un cancer du côlon et quatre fois plus de risque par un cancer du rectum que ne l’était une personne du même âge née en 1950. La hausse de leur incidence est directemen­t liée à des modificati­ons récentes au mode de vie, puisque seulement 7 % de ces cas de cancers colorectau­x précoces sont dus à une susceptibi­lité génétique acquise par hérédité.

UNE QUESTION DE SURPOIDS

Une des principale­s modificati­ons survenues au cours des dernières décennies est la hausse importante du nombre de personnes en surpoids. Selon une analyse de l’institut national de santé publique du Québec, la prévalence de l’obésité au Québec a plus que doublé entre 1987 et 2012 (passant de 8 à 17 %) et devrait atteindre 22 % pour les hommes et 18 % pour les femmes en 2030 (2).

Une étude récemment parue dans JAMA Oncology suggère que cette hausse du nombre de personnes en surpoids contribue à l’augmentati­on de cancers colorectau­x précoces (3). En analysant les dossiers médicaux des 85 256 femmes âgées de 25 à 42 ans qui participen­t depuis 1989 à la Nurses’ Health Study II, les chercheurs ont pu montrer que les femmes qui sont en surpoids sont beaucoup plus à risque d’être touchées par un cancer colorectal en bas âge (avant 50 ans). Comparativ­ement aux femmes minces (IMC entre 18.5 et 22.9), le risque de cancer est augmenté de 37 % chez celles qui souffrent d’embonpoint (IMC entre 25.0-29.9) et de 93 % chez celles qui sont obèses (IMC ≥ 30). En d’autres mots, plus le poids corporel augmente, plus le risque de développer un cancer colorectal en bas âge est élevé.

MODE DE VIE PRO-INFLAMMATO­IRE

Un cancer colorectal requiert en moyenne entre 10 et 35 ans pour se développer et atteindre un stade avancé, détectable cliniqueme­nt. Un cancer colorectal diagnostiq­ué chez un jeune adulte signifie donc que ces cancers sont apparus très tôt dans la vie de ces personnes et qu’ils sont parvenus à évoluer très rapidement. L’obésité favorise cette croissance rapide, car l’excès de graisse crée un climat d’inflammati­on chronique qui accélère l’acquisitio­n de mutations par les cellules précan- céreuses et soutient leur progressio­n. L’alimentati­on occidental­e, riche en produits industriel­s transformé­s contenant des sucres ajoutés et des farines raffinées, est également pro-inflammato­ire et il a été montré que ce type d’alimentati­on augmente considérab­lement le risque de cancer colorectal (4). On peut donc voir à quel point le mode de vie nord-américain (aliments transformé­s, surpoids, sédentarit­é) est toxique pour le corps et accélère de façon extraordin­aire le développem­ent du cancer. (1) Siegel RL et coll. Colorectal cancer incidence patterns in the United States, 1974-2013. J. Natl Cancer Inst. 2017 ; 109 : djw322109. (2) https://www.inspq.qc.ca/sites/default/files/publicatio­ns/2329_ projection­s_poids_corporel_adultes_2013_2030.pdf (3) Liu PH et coll. Associatio­n of obesity with risk of early-onset colorectal cancer among women. JAMA Oncol., publié en ligne le 11 octobre 2018. (4) Tabung FK et coll. Associatio­n of dietary inflammato­ry potential with colorectal cancer risk in men and women. JAMA Oncol. 2018 ; 4 : 366-373.

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