Le Journal de Quebec

Payé 32 000 $ pour des heures supplément­aires jamais faites

Le président des cols bleus de la Ville de Longueuil a gain de cause devant un arbitre du travail

- JEAN-FRANÇOIS CLOUTIER

La Ville de Longueuil va devoir payer au moins 32000 $ en heures supplément­aires au président du syndicat de ses cols bleus, même si ce dernier n’a jamais fait une seule de ces heures.

Officielle­ment, Mario Gauthier travaille pour la Ville à titre de mécanicien depuis 2001.

Mais en réalité, il n’a pas fait de mécanique depuis cette date, car ses fonctions syndicales l’occupent à temps plein.

Cela n’a pas empêché l’organisati­on qu’il dirige de déposer pas moins de 30 griefs couvrant la période entre 2007 et 2011, car la Ville ne lui aurait pas offert la possibilit­é d’effectuer des quarts de travail en heures supplément­aires... en tant que mécanicien.

Les montants réclamés excédaient 32 700 $, en excluant des réclamatio­ns non chiffrées. Le syndicat vient d’obtenir gain de cause.

Les cols bleus reprochaie­nt à la Ville d’avoir « refusé de l’appeler [Mario Gauthier] à diverses occasions pour effectuer du temps supplément­aire, contrairem­ent à [ce que requérait] la convention collective », selon la sentence arbitrale.

Le syndicat alléguait que M. Gauthier pouvait bel et bien effectuer ces heures supplément­aires, car il avait certaines compétence­s en mécanique. Il aurait notamment suivi une formation « à 90 % mécanique ».

« C’est en ce sens-là que je suis diplômé », affirme Gauthier, cité dans la décision.

La Ville arguait de son côté que Gauthier ne pouvait pas se faire appeler pour des heures supplément­aires, car il était en libération syndicale à temps plein.

L’arbitre Bernard Bastien a tranché en faveur de Gauthier, concluant que « ses griefs doivent être accueillis [pour] les jours où il était disponible ».

DÉRAISONNA­BLE, SELON LA VILLE

La Ville de Longueuil a contesté le verdict deux fois sans succès, d’abord en Cour supérieure, puis en Cour d’appel.

Selon elle, Gauthier ne pouvait pas faire d’heures supplément­aires tant qu’il n’était pas « réintégré » dans ses fonctions de mécanicien.

Elle a été déboutée une première fois le 7 mai 2018 par le juge Marc St-pierre, de la Cour supérieure.

Puis, le 5 octobre, le juge Nicholas Kasirer, de la Cour d’appel, a indiqué qu’il serait « quelque peu stérile » de se pencher sur cette cause et qu’il s’était fait remettre un « dossier incomplet » par la Ville de Longueuil.

Selon les documents consultés, une partie du litige trouve son origine dans une entente non prévue à la convention collective, et dont il n’existe aucune trace écrite, entre Mario Gauthier et l’ancienne administra­tion de Claude Gladu (maire de Longueuil de 1994 à 2002 et de 2005 à 2009).

À partir de 2002, Gauthier a ainsi profité d’une entente qui lui permettait de rester à la maison plutôt que de se faire appeler pour effectuer des heures supplément­aires.

Les heures supplément­aires lui étaient versées automatiqu­ement sous forme de temps et non d’argent.

Cela faisait bien l’affaire de Gauthier, car « ça lui allait de prendre plus de congés », selon les documents de cour.

En 2007, toutefois, pour une raison qui n’est pas expliquée, Longueuil a voulu mettre un terme à cette entente.

LA VILLE SE CONFORME

« La Ville de Longueuil n’a pas l’intention de porter en appel la décision. La Ville est en attente de l’évaluation du montant [à payer] par le requérant », nous a indiqué par écrit le porte-parole de la Ville, Louis-pascal Cyr.

L’avocate représenta­nt le syndicat, Me Isabelle Leblanc, s’est réjouie de la décision. « Mario Gauthier avait le droit de se faire appeler pour faire du temps supplément­aire », a-t-elle commenté.

Le syndicat des cols bleus de Longueuil n’a pas rappelé notre Bureau d’enquête.

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CAPTURE ÉCRAN SCFP.QC.CA Mario Gauthier, président à temps plein du syndicat des cols bleus de Longueuil, sera dédommagé, parce que la Ville ne lui a pas offert d’effectuer des heures supplément­aires comme mécanicien.

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