L’ignorance au pouvoir
Nous sommes condamnés désormais à ce que des ignorants nous gouvernent, à ce que le débat public sur les réseaux sociaux soit alimenté par des gens qui ne savent pas de quoi ils parlent, qui vivent dans une confusion intellectuelle permanente et qui affirment avec tonitruance des faussetés et des inexactitudes factuelles.
Doug Ford, le premier ministre de l’ontario, ignore l’histoire des deux peuples fondateurs. Il ne connaît que celle de sa propre famille, dont son frère Rob, l’ancien maire de Toronto, un homme déjanté, obscène et défoncé à la drogue, a été le héros incontestable.
Comment de pareils énergumènes ont-ils réussi, en cette période où l’éducation est devenue en principe la voie d’accès aux connaissances aujourd’hui illimitées, à accéder au pouvoir ? Poser la question, c’est y répondre.
L’époque est justement désespérément inquiétante. Des têtes brûlées, des Don Quichotte de la démocratie chancelante, des power tripeurs, des redresseurs de torts s’intéressent dorénavant à la politique. Car les rêveurs idéalistes d’hier, des hommes et des femmes investis d’une vision civilisatrice, ont tendance à déserter peu à peu les parlements.
AVEUGLEMENT VOLONTAIRE
Trop de nouveaux venus en politique pourraient reprendre à leur compte le vieux dicton populaire québécois « c’qu’on connaît pas nous fait pas mal ». L’ignorance, qu’elle soit politique, économique ou philosophique, n’est pas perçue comme un handicap pour nombre de citoyens.
À trop vouloir « des gens comme nous autres », on va finir par se retrouver vraiment avec des candidats mal formés, non formés, incompétents, semi-compétents. D’ailleurs, l’ignorance, c’est-à-dire la non-connaissance des choses, est davantage perçue comme un trait de personnalité qu’une faille intellectuelle.
À quoi sert de savoir d’où l’on vient, quelle est l’origine des mots et leur sens propre, quelle est la nécessité de s’exprimer selon les règles de la grammaire, à quoi sert de posséder des notions en science et, plus largement, pourquoi devons-nous accéder à la culture universelle ?
Pourquoi s’instruire ? « Qu’ossa donne? », dirait le cher Yvon Deschamps. De toute façon, n’avons-nous pas été dirigés par un surdoué Philippe Couillard, disparu dans le grand balayage du 1er octobre dernier ? Celui-ci ignorait une chose fondamentale en politique : ce que l’on appelle « le monde ordinaire ». Sa distance naturelle l’isolait et son absence de sensibilité devant l’inquiétude identitaire des Québécois l’a perdu politiquement.
Ces ignorants qui nous gouvernent.
POLITIQUE ÉMOTIONNELLE
Trudeau le narcissique, et ainsi l’opposé de Couillard, carbure à l’admiration de ses courtisans, nombreux et flattés par lui. Trudeau est l’homme de son époque. Celui de la vacuité, des flashes, des selfies et de la politique émotionnelle.
Il a légalisé le cannabis, ce qui permet à ses partisans de vivre sans se creuser la tête. Il demande régulièrement pardon, ce qui ne change pas le cours des choses.
Il accumule les déficits, qui pour le moment ne font mal à personne. Il balaie ainsi les problèmes, ce qui le fait sourire béatement, même si dans la réalité l’avenir s’assombrit.
Il ignore tant de choses qui embarrassent l’esprit de ceux qui s’en inquiètent, mais n’osent plus accéder au pouvoir.