Le Journal de Quebec

Discours ambigu du monde des affaires

- MICHEL GIRARD michel.girard@quebecorme­dia.com

Que d’ici 2023-24 le gouverneme­nt de Justin Trudeau accorde aux entreprise­s canadienne­s quelque 16 milliards de dollars d’aide financière (sur 5 ans) à même les revenus de l’état, le milieu des affaires voit là un signe de bonne gestion des fonds publics.

Mais que le ministre des Finances Bill Morneau, aux prises avec le coût de ces cadeaux additionne­ls aux entreprise­s, ne puisse réduire ses déficits budgétaire­s, alors là le milieu des affaires saute sur l’occasion pour le blâmer, une fois de plus.

LES REPROCHES

La Fédération des chambres de commerce du Québec reproche au ministre Morneau d’avoir raté l’occasion d’annoncer un véritable plan de retour à l’équilibre budgétaire alors que l’économie du pays est florissant­e. « Malheureus­ement, affirme son président-directeur général Stéphane Forget, l’énoncé d’aujourd’hui (mercredi dernier) fait fi de la demande du milieu des affaires devant l’absence d’une véritable stratégie pour éliminer les déficits budgétaire­s, désormais évalués à 19,6 milliards de dollars pour 2019-2020. »

À la Chambre de commerce du Montréal métropolit­ain, on met sur le dos des déficits le fait que le gouverneme­nt Trudeau n’ait pas annoncé, en sus des 16 milliards de cadeaux aux entreprise­s, une baisse de l’impôt des entreprise­s.

« L’incapacité d’atteindre l’équilibre budgétaire au cours des dernières années aura créé une situation où le gouverneme­nt ne sent pas qu’il a la marge de manoeuvre pour procéder aux baisses d’impôt qui seraient requises », déplore Michel Leblanc, président de l’organisme.

Du côté du Conseil du patronat, le grand patron Yves-thomas Dor- val estime qu’un « plan de retour à l’équilibre budgétaire dans cinq ans » aurait dû faire « l’objet d’une attention particuliè­re » de la part du gouverneme­nt Trudeau. Et il aurait souhaité une baisse d’impôt pour « rétablir la compétitiv­ité fiscale » face à la réforme fiscale américaine.

Le comble du mécontente­ment : l’institut économique de Montréal (IEDM) accuse le gouverneme­nt Trudeau de faire « fausse route » avec ses mesures destinées aux entreprise­s. De l’avis de Michel Kelly-gagnon, président et directeur général, il aurait fallu baisser l’impôt des entreprise­s canadienne­s au lieu des mesures annoncées.

DONC…

D’une part, le milieu des affaires veut une baisse d’impôt en sus des 16 milliards qu’ottawa vient de lui accorder, et d’autre part, il lui reproche de présenter des déficits.

Pour satisfaire pleinement le milieu des affaires, il aurait fallu quoi ?

Que le gouverneme­nt Trudeau aille puiser ces nouveaux 16 milliards (destinés aux entreprise­s) en haussant les impôts des particulie­rs ? Ou en coupant dans les allocation­s aux familles et les prestation­s aux personnes âgées ? Ou en réduisant les effectifs de la fonction publique ? Ou tiens, mieux encore, en sabrant les transferts aux provinces ?

Il était écrit dans le ciel qu’en accordant d’alléchants cadeaux fiscaux aux entreprise­s dans le cadre du nouvel énoncé économique du ministre des Finances Bill Morneau… cela allait gonfler les déficits déjà prévus pour les prochains exercices financiers.

Lors du budget de février prochain, j’inviterais le milieu des affaires à se garder une petite gêne si le gouverneme­nt Trudeau acquiesce à sa demande de baisse d’impôt, tout en ne baissant pas le déficit !

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