Le Journal de Quebec

Pascal : Des paroles fort sages

- RÉJEAN TREMBLAY rejean.tremblay@quebecorme­dia.com

La chronique facile à écrire est évidente : Jean Pascal n’a plus rien à prouver sur la scène locale et internatio­nale. On sait qu’il est courageux, qu’il a été capable de se préparer pour un dixième combat de championna­t mondial et qu’il a résisté pendant 12 rounds devant Dmitry Bivol.

La chronique encore plus facile découle du préambule. Jean Pascal a fait la démonstrat­ion qu’à 36 ans, il ne peut plus gagner contre l’élite mondiale. Non seulement il ne peut plus gagner, mais, en fait, il n’a plus les ressources pour inquiéter les meilleurs au monde.

La conclusion semble aller de soi : Pascal devrait prendre une vraie retraite pendant qu’il est encore en santé et que l’usure des combats en trop ne paraît pas encore.

De toute façon, sa place dans l’histoire du sport au pays et au Québec est assurée. Mieux, il va faire partie des légendes de la boxe.

Donc, Jean, accroche donc tes gants.

L’ADRÉNALINE ET L’ARGENT

Mais qui suis-je pour donner ce genre de conseil ? Dans la vie, faudrait-il commencer à se bercer dès qu’on a atteint un sommet ? Tant qu’à ça, j’aurais dû prendre ma retraite après les Jeux de Moscou en 1980. Jamais plus, les circonstan­ces ne m’auront permis d’avoir pareil buffet à histoires dans toute ma carrière. Et j’ai des amis chirurgien­s qui auraient dû prendre leur retraite après avoir réussi des premières fulguratio­ns cardiaques extraordin­aires. Et Luc Dionne aurait dû arrêter d’écrire après Omerta. Comment battre Omerta ?

Voyez-vous, il n’y avait plus de KGB et de Lada, mais mon dernier séjour à Moscou comptait son plein de textes qui valaient la peine d’être écrits pour les lecteurs. Et j’ai tripé autant qu’il y a 38 ans. J’ai des amis qui se promènent avec des coeurs qui battent comme des neufs parce que les chirurgien­s adorent toujours pratiquer leur métier. Et Luc Dionne écrit District 31. La vie continue. La vie doit continuer.

C’est pour ça que Jean Pascal sera le seul à prendre sa décision. Il a le droit de chercher encore la fabuleuse poussée d’adrénaline qui le nourrit quand il monte sur un ring, même contre Steve Bossé. Et il a encore le droit de gagner un beau demi-million par année en se battant pendant une vingtaine de rounds.

C’est son droit. Ce ne sont pas encore les groupes de bien-pensants qui mènent toutes les vies au Québec. Certains hommes ont encore le droit de décider.

LE DANGER DE DEVENIR UN « ESCALIER »

Cela dit, il y a quand même un danger réel. Dmitry Bivol a choisi Jean Pascal parce que Pascal avait encore un nom, une réputation et qu’il n’était pas très dangereux. Il s’en est servi comme d’un « escalier » pour atteindre un autre niveau.

Ça risque d’arriver plus souvent à l’avenir. Le problème, c’est que ce ne sont plus les champions qui vont inviter Pascal dans le ring, ce seront de jeunes lions affamés qui voudront se bâtir une réputation. Jean devrait pouvoir se faire une couple de cent mille pendant un an ou deux, mais les bourses vont diminuer à mesure que les risques vont augmenter.

Stéphan Larouche m’a dit, il y a deux ans, que jamais il n’accepterai­t que Jean Pascal ne devienne un simple faire-valoir pour des jeunes vedettes montantes. Lui aussi arrive à un carrefour… Ceux qui aiment sincèremen­t Pascal vont lui parler. Mais c’est lui qui va décider.

« This it it ! », qu’il nous avait dit à Miami. « That’s it ! », avait-il ajouté. C’étaient des paroles fort sages.

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CAPTURE D’ÉCRAN TVA SPORTS Jean Pascal a tout de même résisté pendant 12 rounds devant Dmitry Bivol à Atlantic City, samedi.
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