Le Québec forcé de se tourner vers l’ontario pour recruter
La crise du français dans la province voisine pourrait attirer des travailleurs ici
Face aux besoins criants de main-d’oeuvre qui saignent ses entreprises, la Beauce est allée jusqu’à noliser un avion de neuf places pour recruter des soudeurs franco-ontariens à Sudbury.
« Si on se trouve à débarquer avec un avion de neuf passagers en Ontario, c’est que le message est clair : il n’y a pas de main-d’oeuvre. Les régions en souffrent énormément », avait dit au Journal la coordonnatrice de l’époque du projet La Beauce embauche, Fanie Drouin, avant de partir, l’hiver dernier.
Dix mois plus tard, son nouveau responsable, Mathieu Bouchard, admet que la visite éclair à l’école des métiers du Collège Boréal de Sudbury, financée par l’entreprise privée, la MRC et Desjardins, n’a peut-être pas eu l’impact souhaité.
« Il n’y a pas eu d’embauches liées à ça, mais au moins on s’est fait connaître », partage-t-il avec une pointe de déception. Selon M. Bouchard, la crise linguistique qui enflamme les francophones de l’ontario pourrait cependant renverser la vapeur.
« C’est sûr que ça serait un bon coup d’avoir des Franco-ontariens en Beauce. Vous pouvez être certain que les entreprises les accueilleraient à bras ouverts », lance-t-il.
PAS LA PANACÉE
Mais, selon la porte-parole nationale de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), Martine Hébert, il ne faut pas dire trop vite que ces Franco-ontariens combleraient à eux seuls les besoins urgents de main-d’oeuvre.
« C’est sûr qu’ils seraient accueillis à bras ouverts dans les PME québécoises, mais il ne faut pas voir ça comme la panacée au problème de main-d’oeuvre », nuance toutefois Mme Hébert.
VIVRE AU QUÉBEC
Par ailleurs, pour un Franco-ontarien, vivre au Québec peut être une bonne façon d’avoir plus d’argent dans son portefeuille à la fin du mois. Aliments, logements, dépenses courantes... à peu près tout coûte moins cher ici que dans la province voisine, selon Statistique Canada, rappelle le professeur au Département des sciences économiques de L’UQAM, Pierre Fortin.
Côté impôt, le titulaire de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’université de Sherbrooke, Luc Godbout, souligne qu’une personne célibataire gagnant 45 000 $ paye moins d’impôt au Québec qu’en Ontario. Mais, quand on atteint le chiffre magique de 70 000 $, c’est une autre histoire. Au Québec, on doit remettre 24,4 % de son chèque de paye à l’état, tandis qu’en Ontario ce chiffre fond de près de 5 %, à 19,8 %, conclut M. Godbout.