Les riches et les pauvres
On ne peut pas blâmer Gary Bettman de bomber le torse et de savourer chaque minute de l’impact qu’il exerce auprès des propriétaires de la Ligue nationale de hockey.
Il reçoit un salaire annuel de 7 millions $ parce que ses actions ont permis à la ligue d’engranger des revenus de 5 milliards.
Cette semaine, le commissaire a complété un autre tour de force en accordant une concession à Seattle. Pendant des années, on lui disait de transférer les Coyotes de l’arizona dans l’état de Washington, mais il a refusé de poser un tel geste parce qu’il avait déjà préparé un modèle d’affaires lui permettant d’envahir un nouveau territoire.
Et il ne faudrait pas s’étonner si, dans quelques mois, peut-être dans un an ou deux, les Coyotes établissent pignon sur rue à Houston… parce que le commissaire veut créer une rivalité Houston/dallas, et aussi parce que le propriétaire du centre sportif à Houston a déjà manifesté un intérêt pour le hockey de la Ligue nationale.
Bettman est un fin négociateur, un fin retard, disent ceux qui le connaissent très bien. Il concocte toujours un plan pour donner plus de lustre à la ligue.
LA SANTÉ DES CONCESSIONS
J’écoutais ses propos au sujet de la santé des concessions. Il ne cessait de répéter que jamais dans le passé la ligue n’a connu une telle progression et du même coup, une telle rentabilité.
Pas étonnant qu’il pousse l’audace jusqu’à réclamer 650 millions pour une concession alors que selon la revue Forbes, seulement 11 des 31 concessions ont une valeur au marché de 650 millions ou plus. Les Penguins sont installés au 11e rang.
La LNH compte maintenant quatre concessions dont la valeur dépasse le milliard : les Rangers, les Maple Leafs, le Canadien et les Blackhawks.
Trois formations, les Bruins, les Kings et les Flyers, ont une valeur au marché de 800 millions.
Mais l’écart entre les riches et les pauvres est beaucoup trop important pour crier victoire et pour claironner que les équipes sont financièrement en très bonne santé.
LES RANGERS PREMIERS
Si les Rangers valent 1,55 milliard, suivis des Leafs (1,45 milliard), du Canadien (1,3 milliard) et des Blackhawks (1,05 milliard), Bettman devra trouver une solution pour sortir d’impasse quelques concessions qui n’ont aucune chance de progresser dans leur marché actuel.
Les Coyotes ont une valeur aux livres de 290 millions. C’est 1 milliard et demi de moins que la valeur des Rangers. Les Panthers ne touchent pas le plateau des 300 millions. Et les Blue Jackets valent, toujours selon Forbes, 320 millions.
Il y a 12 équipes qui ont une valeur aux livres entre 350 millions et 500 millions.
Donc, si on ne discute pas d’une expansion dans les prochaines années, il y a toujours la possibilité d’un transfert. Bettman n’a jamais été en faveur d’une telle solution, mais c’est correct ainsi. Publiquement, il doit faire refléter que tout va bien. Mais, en coulisses, on s’inquiète de la situation à Ottawa. On se demande pendant combien de temps le nouveau propriétaire des Hurricanes va tenir le coup. Les Panthers évoluent devant des gradins à moitié vides et ce n’est jamais bon pour l’image de la ligue.
REVENUS DE 239 MILLIONS
En ce qui a trait aux revenus, 19 équipes encaissent 150 millions et moins. C’est nettement insuffisant si on compare aux 239 millions du Canadien.
Bettman affirmait que la ville de Seattle a comblé trois conditions essentielles : des propriétaires sérieux et impliqués ; un amphithéâtre moderne ; un public et une ville intéressés.
Il me semble que Québec réunit ces trois conditions.
Bettman va se battre pour éviter que l’affaire Winnipeg/atlanta se répète. Il a tout tenté pour éviter qu’une équipe américaine se retrouve au Canada. Mais, parfois, la réalité l’invite à réviser ses positions. Il n’aura pas le choix. Pour le moment, maintenant que le dossier Seattle est complété, il lui faudra affronter l’association des joueurs pour discuter de la Coupe du monde, de la prochaine convention de travail, du transfert des Coyotes dans la division Centrale.
Et les joueurs ont aussi l’intention de lui faire la vie dure relativement à la clause « escrow », les patineurs devant combler le manque à gagner si jamais la ligue n’atteint pas les revenus escomptés.
PARTENARIAT À REVOIR
Les joueurs sont partenaires à 50-50, mais est-ce vraiment le cas ? Ils ont leur part de responsabilités dans ce dossier.
S’ils détestent autant la clause en fidéicommis, pourquoi n’invitent-ils pas la ligue à déménager des concessions comme la Floride, entre autres, dans une ville comme Québec ?
S’ils sont vraiment des partenaires, le moment n’est-il pas choisi pour lever le ton et faire valoir leur point de vue.
Peut-être le feront-ils en mettant un terme à la présente convention plus tôt que prévu ?
Se dirige-t-on vers un autre conflit de travail ?