Le Journal de Quebec

Manger santé ne devrait pas être compliqué!

En novembre dernier, j’étais à Chicago pour participer au congrès annuel de l’american Heart Associatio­n (un important colloque de cardiologi­e) avec certains de mes collègues de l’institut universita­ire de cardiologi­e et de pneumologi­e de Québec – Univers

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Cependant, et je l’ai déjà souligné à cette tribune, beaucoup de Québécois sont malades et ont une qualité de vie diminuée trop tôt dans leur existence.

Pourtant, la science de la prévention est abondante en 2018 et elle nous confirme que de ne pas fumer, être physiqueme­nt actif sur une base régulière, avoir une alimentati­on de bonne qualité, dormir suffisamme­nt, faire attention à son tour de taille et ne pas boire d’alcool de façon exagérée peut prolonger notre espérance vie de plus de 10 ans (14 ans chez la femme et 12 ans chez l’homme).

Malheureus­ement, seulement 2 % de la population met ces recommanda­tions très simples en applicatio­n. Pourquoi en est-il ainsi ?

NOUS AVONS BESOIN D’OUTILS

Lors du colloque de Chicago, j’ai abondammen­t discuté de cette question avec mes collègues américains. La population et les médecins sont sensibilis­és au fait qu’il faut être actif et manger mieux, mais très peu d’entre eux ont les compétence­s nécessaire­s en la matière et les médecins n’ont pas d’outils simples et efficaces à leur dispositio­n pour évaluer le niveau d’activité physique et la qualité de l’alimentati­on de leurs patients.

Pourtant, ce genre d’outils existe. Par exemple, en France, mon collègue Serge Hercberg a instauré un système (le Nutri-score) basé sur un code de couleurs (de vert, le plus favorable sur le plan nutritionn­el, à rouge, le moins favorable sur le plan nutritionn­el) qui permet aux consommate­urs de faire des achats éclairés et de manger mieux, preuves scientifiq­ues à l’appui.

D’ailleurs, le Nutri-score est maintenant implanté en Belgique et en Espagne. À quand un Nutri-score au Québec ? L’étiquetage nutritionn­el si compliqué chez nous est-il vraiment utile au consommate­ur ?

Le Dr Frank Hu de l’école de santé publique de l’université Harvard (une sommité en matière de nutrition et santé et un grand collaborat­eur de nos équipes à l’université Laval) s’est beaucoup intéressé à la mesure de la qualité globale de l’alimentati­on.

Il était d’ailleurs membre du comité qui a produit les dernières recommanda­tions américaine­s en matière de nutrition et de santé en 2015. Ces recommanda­tions sont simples et claires :

√ Consommer les aliments en fonction de leurs effets positifs ou négatifs sur la santé plutôt que de leurs teneurs en calories et en nutriments ;

√ Choisir le gras selon sa qualité, et non la quantité. Par exemple, une diète riche en gras peut être excellente pour la santé si la source est végétale, comme l’huile d’olive, alors qu’une alimentati­on riche en gras animal est déconseill­ée ;

√ Manger moins de viande pour améliorer non seulement la santé humaine, mais aussi celle de la planète ; √ Consommer avec modération les aliments transformé­s par l’industrie, car le sucre raffiné et le sel ajoutés dommageabl­es pour la santé y sont omniprésen­ts ; les aliments raffinés bourrés de mauvais gras abondent également dans l’offre alimentair­e.

√ Promouvoir une culture de la santé avec des systèmes alimentair­es équitables afin que toute la population ait accès à des aliments peu coûteux et bons pour la santé.

Pouvons-nous, au Québec, nous donner les moyens d’outiller les profession­nels de la santé et la population et leur donner des balises simples et claires comme le NutriScore afin qu’ils puissent aider les gens à faire des choix alimentair­es éclairés ?

Chers élus, les outils préventifs existent. Mettons la science au service des citoyens ! Bâtissons maintenant une nouvelle économie pour le Québec basée sur la prévention et la santé durable. * Jean-pierre Després est professeur au Départemen­t de kinésiolog­ie de la Faculté de médecine de l’université Laval. Il est également directeur de la recherche en cardiologi­e à l’institut universita­ire de cardiologi­e et de pneumologi­e de Québec. Depuis 2015, il est directeur de la science et de l’innovation à l’alliance santé Québec.

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Chercheur C.Q., Ph. D., FAHA * Collaborat­ion spéciale

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