Moins de chances d’atteindre le cégep
Les élèves du régulier deux fois moins nombreux que ceux du privé à s’y rendre
Au secondaire, les élèves du secteur régulier au public sont deux fois moins nombreux à accéder au cégep que ceux inscrits au privé ou dans des programmes particuliers.
La différence est « spectaculaire », lance Pierre Doray, un professeur à L’UQAM qui a réalisé une étude inédite sur le sujet, en collaboration avec cinq autres collègues.
En analysant les données administratives d’une cohorte de 22 500 élèves sur une période de 10 ans, les chercheurs sont parvenus à ce constat : 36 % des élèves des classes régulières des écoles publiques poursuivent leurs études au cégep, alors que ce même taux est d’au moins 75 % pour ceux inscrits dans des programmes particuliers ou des écoles privées.
« On a été étonnés que l’écart soit si grand », affirme M. Doray, qui est « préoccupé » par la situation, tout comme ses collègues.
« L’école reproduit et vraisemblablement accentue les inégalités, plutôt que de contribuer à les aplanir en offrant le même enseignement de qualité à tous les élèves, peu importe leur origine sociale », écrivent les auteurs de l’étude, dans un article scientifique à paraître.
« GHETTO »
En réponse à la concurrence menée par les écoles privées, les concentrations et les programmes particuliers se sont multipliés dans le réseau public au cours des dernières années. Les élèves y sont sélectionnés dans la majorité des cas, selon les données recensées par les chercheurs.
Résultat : les classes du secondaire régulier public sont composées d’une majorité d’élèves faibles ou en difficulté, ce qui a des effets pervers puisque les élèves forts qui agissent normalement comme locomotives dans un groupe y sont absents, explique M. Doray.
En plus, les élèves qui sont au régulier ont moins de chance de poursuivre leurs études au cégep que les autres, démontre cette étude. « C’est comme si on était dans un ghetto d’où on peut difficilement sortir », illustre M. Doray.
SOLUTION ?
L’abolition pure et simple des subventions publiques aux écoles privées n’est toutefois pas la solution, puisqu’un tel changement ne ferait que « déplacer le problème » en encourageant les écoles publiques à développer encore davantage de programmes sélectifs, explique le professeur de L’UQAM.
La solution pourrait plutôt passer par des activités parascolaires obligatoires, qui représenteraient une sorte de formation complémentaire, ou encore des programmes particuliers ouverts à tous les élèves, sans sélection, avancent les chercheurs.
« C’est une corde excessivement sensible, indique M. Doray. Les parents veulent le meilleur pour leurs enfants. Il n’y a personne qui est contre ça, mais ça crée des effets pervers.