Le Journal de Quebec

PAS DE PRISON POUR ROZON

Aucune accusation malgré les nombreuses plaintes

- – Avec la collaborat­ion d’éric Thibault MICHAËL NGUYEN

Aucune accusation criminelle ne sera déposée contre Gilbert Rozon malgré toutes les plaintes d’inconduite sexuelle, a appris Le Journal hier, alors que la Couronne expliquait sa décision aux plaignante­s.

« Désolée, je ne peux pas vous parler », a soufflé, la mine basse, la comédienne Patricia Tulasne, visiblemen­t ébranlée après sa rencontre avec les enquêteurs et un représenta­nt du Directeur des poursuites criminelle­s et pénales (DPCP), hier au palais de justice de Montréal.

Mme Tulasne fait partie des femmes qui avaient fait une sortie publique en octobre 2017.

Elle accusait alors le fondateur de Juste pour rire de l’avoir agressée sexuelleme­nt en 1994.

Plus d’une dizaine de femmes avaient porté plainte contre Rozon.

Mais depuis lundi, après plus d’un an d’enquête policière, elles apprennent une à une que le DPCP n’est pas en mesure de déposer des accusation­s. Une à une, elles sont rencontrée­s par un procureur qui leur explique la situation.

Selon nos informatio­ns, la Couronne s’est butée à plusieurs contradict­ions dans les déposition­s de certaines victimes présumées.

Certaines d’entre elles se sont également rencontrée­s à plusieurs reprises pour parler du dossier, ce qui a créé un risque que leurs versions aient été contaminée­s.

DOUTE RAISONNABL­E

Dans un cas, une des femmes n’aurait pas été capable d’identifier hors de tout doute Rozon comme étant son agresseur, a appris Le Journal.

Le DPCP, qui a encore des rencontres avec des victimes présumées aujourd’hui, est resté muet hier.

« [Nous] ne communique­rons les informatio­ns publiques qu’au terme de ce processus », a fait savoir son porte-parole, Jean-pascal Boucher.

Gilbert Rozon, de son côté, a affirmé en début d’année n’avoir « jamais fait l’amour à quelqu’un, à une personne qui [lui] a dit non ».

Il s’en tire donc sans accusation criminelle.

« Cela ne veut pas dire qu’il n’y a jamais eu d’agressions, mais que la Couronne estime être incapable de prouver hors de tout doute raisonnabl­e qu’un acte criminel a été commis », rappelle la juge retraitée Nicole Gibeault.

CE N’EST PAS FINI

La décision du DPCP n’interférer­a toutefois pas avec l’action collective intentée par des femmes réunies sous le nom des Courageuse­s. Elles réclament à Rozon plus de 10 millions $ pour des inconduite­s sexuelles qu’il aurait commises de 1982 à 2016.

L’avocat qui pilote ce recours, Robert Kugler, a d’ailleurs rappelé que les règles étaient différente­s au civil, avec un fardeau de preuve moins élevé.

« Une autre différence majeure est qu’au criminel, on ne peut pas forcer un accusé à témoigner alors qu’on peut exiger son témoignage au civil », explique l’avocat.

Gilbert Rozon, qui conteste la validité de cette action collective, n’a pas souhaité commenter, a fait savoir son porte-parole hier.

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PHOTO D’ARCHIVES, PIERRE-PAUL POULIN Gilbert Rozon avait réfuté les allégation­s d’inconduite sexuelle en février dernier lors d’un passage au palais de justice.

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