Bombardier paie encore pour ses retards
VIA Rail a préféré accorder le contrat de 989 millions $ pour 32 rames de train au géant allemand Siemens
Les nombreux retards chez Bombardier Transport pourraient avoir une fois de plus pénalisé l’entreprise, a laissé entendre hier la direction de VIA Rail Canada, qui vient d’octroyer un contrat de 1 milliard $ à Siemens.
L’entreprise voit le contrat de 989 millions $ pour la construction de nouveaux trains qui rouleront dans le corridor Québec-windsor lui échapper. La somme en jeu pourrait même atteindre 1,5 milliard $, puisque le contrat signé hier contient également des options pour l’achat de 16 rames additionnelles au cours des prochaines années.
En conférence de presse, hier, les dirigeants de VIA Rail Canada ont laissé entendre que l’accord de libre-échange Canada-europe les empêchait d’exiger dans l’appel d’offres du contenu local, ce qui aurait favorisé Bombardier, ou à tout le moins des fournisseurs canadiens.
Mais ils ont également reconnu que le respect des échéanciers fixés par la société d’état avait été un facteur déterminant dans la sélection du vainqueur.
« L’échéancier de livraison était un critère important, parce qu’on est à retirer la flotte actuelle dès 2019, graduellement. Donc, dans l’évaluation que les comités techniques ont faite, ils ont évalué la disponibilité des équipements et des sous-systèmes, et ont fait une évaluation qui a favorisé Siemens [par rapport à Bombardier] », a indiqué en point de presse le président et chef de la direction de VIA Rail Canada, Yves Desjardins-siciliano.
Cette évaluation tenait notamment compte de la « disponibilité de la technologie et de la capacité du fabricant de livrer la technologie à temps ».
« Ce n’est pas une évaluation de l’histoire de la société, c’est la capacité de la livrer dans un échéancier serré », a-t-il nuancé.
DU CONTENU LOCAL… PEUT-ÊTRE
Peut-être en réponse aux critiques, le fabricant des 32 nouvelles rames de train, l’allemande Siemens, s’est fixé l’« objectif » « d’utiliser du contenu canadien dans une proportion de plus de 20 % en ce qui concerne les fournitures et les services ».
Rien ne l’oblige à donner suite à cet engagement, a toutefois reconnu le président du matériel roulant de Siemens États-unis, Michael Cahill. Les véhicules seront construits en Californie, mais la société compte ouvrir des bureaux d’approvisionnement en Ontario et au Québec, a-t-il ajouté.
Le PDG de VIA croit toutefois que cet objectif est réaliste.
« Puisqu’on doit faire appel à des sous-traitants [VIA et Siemens] vont en chercher à proximité de l’un de ses sites [d’entretien] », Montréal et Toronto.
Pendant ce temps, Bombardier accuse, une fois de plus, le coup.
« Il nous apparaît inconcevable que l’appel d’offres pour un train qui passera dans deux capitales nationales n’ait pas fait l’objet de mesures visant à assurer un maximum de retombées locales et l’utilisation de haute technologie canadienne », a indiqué Bombardier Transport.
L’entreprise soutient que VIA a refusé par deux fois d’étudier une offre révisée qui aurait mieux répondu à ses besoins.
« C’EST PAS UNE ÉVALUATION DE L’HISTOIRE [DE BOMBARDIER], C’EST LA CAPACITÉ DE LIVRER DANS UN ÉCHÉANCIER SERRÉ » – Yves Desjardins-siciliano, PDG de VIA Rail
« On aurait pu, peut-être, avoir des critères qui auraient favorisé les compagnies canadiennes ou québécoises » – Le ministre québécois de l’économie, Pierre Fitzgibbon
« On parle de l’argent des contribuables, et la compétition fut basée sur le meilleur prix, le meilleur produit, sa disponibilité [...] et sa fiabilité. » – Le ministre canadien des Transports, Marc Garneau
« Ottawa a fait des accrocs injustifiables au respect des droits humains pour vendre des blindés à l’arabie saoudite. Il ne lève pas le petit doigt pour faciliter l’obtention d’un contrat pour Bombardier. » – Le porte-parole de Québec solidaire en matière de services publics, Vincent Marissal
« C’est une trahison des travailleurs et des contribuables canadiens qui financent VIA Rail et qui s’attendent à ce que cette société d’état fasse preuve de loyauté en créant des emplois ici pour renforcer notre économie. » – Le président national du syndicat Unifor, Jerry Dias