Le Journal de Quebec

Bombardier paie encore pour ses retards

VIA Rail a préféré accorder le contrat de 989 millions $ pour 32 rames de train au géant allemand Siemens

- PHILIPPE ORFALI Le coût d’entretien des rames est évalué à 23,7 millions de dollars par an pour 15 ans. La mise en service se déroulera graduellem­ent, de 2022 à 2024.

Les nombreux retards chez Bombardier Transport pourraient avoir une fois de plus pénalisé l’entreprise, a laissé entendre hier la direction de VIA Rail Canada, qui vient d’octroyer un contrat de 1 milliard $ à Siemens.

L’entreprise voit le contrat de 989 millions $ pour la constructi­on de nouveaux trains qui rouleront dans le corridor Québec-windsor lui échapper. La somme en jeu pourrait même atteindre 1,5 milliard $, puisque le contrat signé hier contient également des options pour l’achat de 16 rames additionne­lles au cours des prochaines années.

En conférence de presse, hier, les dirigeants de VIA Rail Canada ont laissé entendre que l’accord de libre-échange Canada-europe les empêchait d’exiger dans l’appel d’offres du contenu local, ce qui aurait favorisé Bombardier, ou à tout le moins des fournisseu­rs canadiens.

Mais ils ont également reconnu que le respect des échéancier­s fixés par la société d’état avait été un facteur déterminan­t dans la sélection du vainqueur.

« L’échéancier de livraison était un critère important, parce qu’on est à retirer la flotte actuelle dès 2019, graduellem­ent. Donc, dans l’évaluation que les comités techniques ont faite, ils ont évalué la disponibil­ité des équipement­s et des sous-systèmes, et ont fait une évaluation qui a favorisé Siemens [par rapport à Bombardier] », a indiqué en point de presse le président et chef de la direction de VIA Rail Canada, Yves Desjardins-siciliano.

Cette évaluation tenait notamment compte de la « disponibil­ité de la technologi­e et de la capacité du fabricant de livrer la technologi­e à temps ».

« Ce n’est pas une évaluation de l’histoire de la société, c’est la capacité de la livrer dans un échéancier serré », a-t-il nuancé.

DU CONTENU LOCAL… PEUT-ÊTRE

Peut-être en réponse aux critiques, le fabricant des 32 nouvelles rames de train, l’allemande Siemens, s’est fixé l’« objectif » « d’utiliser du contenu canadien dans une proportion de plus de 20 % en ce qui concerne les fourniture­s et les services ».

Rien ne l’oblige à donner suite à cet engagement, a toutefois reconnu le président du matériel roulant de Siemens États-unis, Michael Cahill. Les véhicules seront construits en Californie, mais la société compte ouvrir des bureaux d’approvisio­nnement en Ontario et au Québec, a-t-il ajouté.

Le PDG de VIA croit toutefois que cet objectif est réaliste.

« Puisqu’on doit faire appel à des sous-traitants [VIA et Siemens] vont en chercher à proximité de l’un de ses sites [d’entretien] », Montréal et Toronto.

Pendant ce temps, Bombardier accuse, une fois de plus, le coup.

« Il nous apparaît inconcevab­le que l’appel d’offres pour un train qui passera dans deux capitales nationales n’ait pas fait l’objet de mesures visant à assurer un maximum de retombées locales et l’utilisatio­n de haute technologi­e canadienne », a indiqué Bombardier Transport.

L’entreprise soutient que VIA a refusé par deux fois d’étudier une offre révisée qui aurait mieux répondu à ses besoins.

« C’EST PAS UNE ÉVALUATION DE L’HISTOIRE [DE BOMBARDIER], C’EST LA CAPACITÉ DE LIVRER DANS UN ÉCHÉANCIER SERRÉ » – Yves Desjardins-siciliano, PDG de VIA Rail

« On aurait pu, peut-être, avoir des critères qui auraient favorisé les compagnies canadienne­s ou québécoise­s » – Le ministre québécois de l’économie, Pierre Fitzgibbon

« On parle de l’argent des contribuab­les, et la compétitio­n fut basée sur le meilleur prix, le meilleur produit, sa disponibil­ité [...] et sa fiabilité. » – Le ministre canadien des Transports, Marc Garneau

« Ottawa a fait des accrocs injustifia­bles au respect des droits humains pour vendre des blindés à l’arabie saoudite. Il ne lève pas le petit doigt pour faciliter l’obtention d’un contrat pour Bombardier. » – Le porte-parole de Québec solidaire en matière de services publics, Vincent Marissal

« C’est une trahison des travailleu­rs et des contribuab­les canadiens qui financent VIA Rail et qui s’attendent à ce que cette société d’état fasse preuve de loyauté en créant des emplois ici pour renforcer notre économie. » – Le président national du syndicat Unifor, Jerry Dias

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PHOTO PIERRE-PAUL POULIN Construits en Californie, les nouveaux trains de VIA Rail Canada seront néanmoins entretenus à Montréal et à Toronto, s’est défendue hier la direction de la société d’état. Sur la photo, des employés de VIA Rail, à Montréal, lors de l’annonce de la décision.

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