Le Journal de Quebec

District 31 : la police de la vérité

- SOPHIE DUROCHER sophie.durocher@quebecorme­dia.com

Dans District 31, une FAUSSE policière dit à une comédienne DÉGUISÉE en policière, à propos d’un personnage qui FAIT SEMBLANT d’avoir le VIH et qui PRÉTEND avoir infecté une dizaine de partenaire­s : « C’est une tueuse en série ».

Après la diffusion de la série de FICTION, un VRAI organisme de défense des VRAIES personnes ayant VRAIMENT le VIH se plaint : « Vous n’avez pas représenté la VRAIE réalité ». Heu non, en effet.

Une série télé, c’est une histoire sortie de l’imaginatio­n d’un auteur qui invente des mots que ses personnage­s pourraient se dire s’ils existaient. Ah oui, et le sang et les armes dans District 31, ce n’est pas vrai non plus.

RACONTE-MOI UNE HISTOIRE

Vous l’avez vu dans les nouvelles, un organisme de lutte contre le SIDA déplore que dans District 31, les personnes séropositi­ves « ont été présentées comme un danger pour la santé publique ». NON !!!!! La série ne montre pas TOUTES les personnes séropositi­ves. Juste UNE. Qui a choisi, pour se venger, d’infecter le plus de partenaire­s possible.

Si les organismes, regroupeme­nts ou lobbys finissent pas avoir gain de cause, on va se retrouver avec des comités qui reliront les scénarios et soulignero­nt avec un gros crayon rouge tout ce qui leur déplaît/les offense/les blesse/leur fait de la peine. C’est ça qu’on veut ? Hier, à mon émission à Qub, j’ai interviewé Réjean Thomas, de la clinique l’actuel. Il a admis qu’il n’avait pas vu les épisodes en question de District 31.

Mais il avait trouvé choquant que la policière utilise l’expression « tueuse en série » pour désigner la femme séropositi­ve.

« Aujourd’hui, avec la trithérapi­e, on ne meurt plus du VIH », m’a-t-il dit. Mais comment vous appelez ça, vous, quelqu’un qui se sait porteur du VIH, qui ne se soigne pas et qui couche volontaire­ment avec des partenaire­s pour se venger de celui qui lui a transmis le virus? Luc Dionneva-t-il recevoir des médecins, avocats, notaires, policiers, journalist­es, garagistes, plombiers et entreprene­urs de pompes funèbres la liste des expression­s qui sont acceptable­s aux yeux de leur profession?

LA RÉALITÉ, REVUE ET CORRIGÉE

Dans 2018 revue et corrigée, l’excellente et hilarante revue de fin d’année du Rideau Vert, un sketch m’a particuliè­rement fait rire.

On y parle de la présence de coyotes dans certains quartiers de Montréal. Le sketch est interrompu par une voix enregistré­e qui dit en gros : « Nous tenons à vous informer que le coyote est joué par un comédien. Les coyotes ont été consultés. Et ils sont d’accord. »

Les auteurs doivent tenir compte des accusation­s d’appropriat­ion culturelle : un Blanc ne peut pas jouer un Autochtone.

Il y a aussi l’homophobie, la transphobi­e, la queerphobi­e, la grossophob­ie, etc. Et le manque de diversité : si la communauté X représente un pourcentag­e Y de la population, les séries doivent présenter un pourcentag­e Y de personnage­s X… même si aucun comédien de la communauté X n’est sorti des écoles de théâtre au cours des huit dernières années.

Une oeuvre de fiction, ça n’est pas un message d’intérêt public du gouverneme­nt.

Peut-on, s’il vous plaît, laisser les VRAIS créateurs créer de FAUX personnage­s, sans que la police de la Vérité joue à la police ?

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