L’argent « discret » de l’industrie énergétique octroyé à un prof
Plus de 500 000 $ en 5 ans ont été remis à la Chaire en énergie de HEC Montréal
Pétrolières, gazières et éoliennes ont injecté plus d’un demi-million $ dans la Chaire en énergie de HEC Montréal de Pierre-olivier Pineau, qui commente régulièrement les enjeux énergétiques dans les médias.
« C’est moi qui parle. Il n’y a pas de commande de mes partenaires », répète en cours d’entretien le titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie, HEC Montréal, Pierre-olivier Pineau, qui a publié vendredi sa 5e édition de L’état de l’énergie au Québec, financée cette année par Transition énergétique Québec.
Selon M. Pineau, la meilleure preuve de l’absence totale d’influence du secteur privé dans ses travaux vient du fait que chacune des entreprises donne le même montant à son groupe.
ESSENCE TROP CHÈRE
« Ce qui n’est pas forcément indiqué complètement explicitement [dans le rapport annuel], c’est que chaque partenaire contribue pour un montant égal au fonctionnement de la Chaire. Jusqu’à cette année, c’était 20 000 $ », précise le professeur.
Quand Le Journal a démontré que les automobilistes québécois paient depuis des années un prix beaucoup plus élevé à la pompe, entre 15 et 20 cents le litre, en raison d’un calcul erroné de la Régie de l’énergie, M. Pineau s’en est pris au Journal dans les médias.
Il a reconnu que la Régie devait revoir sa méthode de calcul, mais a refusé d’établir un lien direct entre le prix minimum de la Régie et le prix payé à la pompe.
Malgré son financement, Pierre-olivier Pineau s’estime toujours libre de critiquer tant le gouvernement que l’entreprise privée dans ses travaux.
Il affirme n’avoir jamais été « complaisant » envers le gouvernement dans l’atteinte de ses cibles de réduction de GES et avoir même relevé les « incohérences majeures » de certains de ses plans.
FONDÉE PAR L’INDUSTRIE
Pierre-olivier Pineau ajoute également qu’il ne s’est pas gêné pour se mouiller dans la filière éolienne alors qu’un partenaire de sa Chaire a des intérêts dans ce secteur.
« Quand j’ai dit que le projet Apuiat n’était pas nécessaire, je peux vous dire que les gens de Boralex m’ont fait des petits sourires en coin en me disant : “On n’était pas très contents Pierre-olivier quand tu as dit ça” », raconte le chercheur.
Fondée en 2013, la chaire de recherche est une idée de l’industrie gazière. Elle « a d’abord germé dans l’esprit de Martin Imbleau de Gaz Métro », lit-on dans son Rapport annuel 2014-2015.
Pour M. Imbleau, actuel vice-président principal d’énergir (anciennement Gaz Métro), et membre du Conseil consultatif de la Chaire, l’intégrité de la chaire est irréprochable.
LIGNE ÉDITORIALE INDÉPENDANTE
« On a une entente entre tous les partenaires et la Chaire, supervisée par HEC Montréal, où la ligne éditoriale est complètement indépendante et les prises de position ne sont jamais validées par qui que ce soit », assure-t-il.
À sa création en décembre 2013, six des neuf partenaires venaient de l’industrie pétrolière, gazière ou éolienne (Boralex, Enbridge, Gaz Métro, Golder Associés, Pétrolia ou Valero).
Aujourd’hui, 60 % d’entre eux sont du secteur : Enbridge et Valéro dans le pétrole, Énergir dans le gaz naturel ainsi que Boralex, ENERCON et Brookfield dans l’éolien.
« CE QUI N’EST PAS FORCÉMENT INDIQUÉ COMPLÈTEMENT EXPLICITEMENT [DANS LE RAPPORT ANNUEL], C’EST QUE CHAQUE PARTENAIRE CONTRIBUE POUR UN MONTANT ÉGAL » – Pierre-olivier Pineau
L’an prochain, BMO, Mccarthy Tétrault et PWC cesseront de financer la Chaire. Et Hydro-québec et WSP deviendront de nouveaux partenaires, nous a fait savoir M. Pineau.