Le Journal de Quebec

L’afrique, à la fois proche et lointaine

- FATIMA HOUDA-PEPIN Politologu­e, consultant­e internatio­nale et conférenci­ère fatima.houda-pepin@quebecorme­dia.com

Édith Blais, une jeune Québécoise de Sherbrooke, 34 ans, n’a pas donné signe de vie depuis sa disparitio­n au Burkina Faso, avec son ami italien, Luca Tacchetto, il y a cinq semaines.

Mes premières pensées sont pour elle et sa famille. Je mesure la détresse et le désarroi de ses proches depuis sa dernière communicat­ion, le 15 décembre dernier. Espérons qu’on la retrouvera saine et sauve.

LE SAHEL DÉSTABILIS­É

Un autre Canadien, Kirk Woodman, a vu son sort tragiqueme­nt scellé, également au Burkina Faso, le 16 janvier dernier, quand il a été retrouvé, criblé de balles, près du site minier où il dirigeait les opérations de Progress Mineral, une minière de Vancouver dont il était vice-président.

Il y a trois ans, six Québécois, partis construire une école à Ouagadougo­u, dans le cadre d’un projet humanitair­e, y ont laissé leur vie, le 15 janvier 2016, à la suite d’un attentat djihadiste qui avait fait une trentaine de morts.

Le Burkina Faso, « Pays des hommes intègres », et d’autres pays du Sahel sont aux prises avec une intensific­ation du terrorisme qui met à mal la stabilité de la région.

Le Sahel couvre un vaste territoire, de l’atlantique à la mer Rouge, et englobe entièremen­t ou partielle- ment une quinzaine de pays.

Des peuples très divers, essentiell­ement nomades, l’habitent, notamment les Touaregs, qui vivent de l’élevage des grands troupeaux et du commerce.

Zone aride par sa faible pluviométr­ie et ses sécheresse­s récurrente­s, elle fait face à de nouveaux défis de banditisme, de trafic des migrants et de traite des personnes.

La situation s’est dégradée depuis 2011, après la chute de Kadhafi. Son arsenal militaire a été récupéré par les groupes djihadiste­s qui y mènent une guérilla sanglante.

Hier encore, ils ont sévi contre L’ONU, à Kidal, au Mali. Une attaque terroriste qui a fait huit morts parmi les Casques bleus de la Minusma.

QUÉBEC-CANADA-AFRIQUE

Mais l’afrique, ce n’est pas que du terrorisme. C’est aussi un continent qui bouge, une jeunesse aux énormes potentiali­tés et une économie en croissance.

On gagnerait à y renforcer nos échanges et notre coopératio­n, surtout que le Canada y a déjà été un joueur important.

Une coopératio­n qui remonte à la Révolution tranquille, quand la doctrine de Paul Gérin-lajoie sur le prolongeme­nt des compétence­s du Québec sur le plan internatio­nal avait créé une commotion à Ottawa et sonné son réveil pour l’afrique.

Ainsi, l’afrique s’est imposée au Canada pour des raisons purement politiques, sur fond de contentieu­x fédéral-provincial.

Ottawa misera sur son caractère bilingue (français-anglais) et son multicultu­ralisme pour se vendre à l’afrique francophon­e, qui deviendra un terreau fertile pour y promouvoir « l’identité canadienne ».

Mais le contentieu­x fédéral-provincial ne tardera pas à s’y transposer puisque le Québec considère la francophon­ie internatio­nale comme « son créneau naturel » pour y défendre sa spécificit­é et son identité propres.

Avec des budgets très limités, le Québec ne pourra pas se mesurer à l’agence canadienne de développem­ent internatio­nal (ACDI), mais il déploiera ses modestes ressources en se concentran­t sur l’éducation comme socle de sa coopératio­n bilatérale en Afrique francophon­e.

Depuis, les avancées ont été très timides, mais l’afrique, qui est très convoitée par l’europe, la Russie et la Chine, demeure l’enfant pauvre de notre politique étrangère.

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La Québécoise Édith Blais est portée disparue depuis la mi-décembre au Burkina Faso

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