Le Journal de Quebec

« JE FAIS TOUJOURS DES CAUCHEMARS »

2 ans après l’attentat de la mosquée

- ARNAUD KOENIG-SOUTIÈRE

Khadija Thabti, la veuve d’aboubaker Thabti (en mortaise), assassiné avec 5 autres membres de la communauté musulmane de Québec lors de la tragédie du 29 janvier 2017, est encore hantée par les événements et appréhende avec angoisse la commémorat­ion qui aura lieu dans les prochains jours, a-t-elle confié au Journal. Ses enfants, Mohamed et Meriem, en vivent aussi des séquelles, dit-elle.

Deux ans après l’attentat à la grande mosquée de Québec, la veuve d’une victime de la tuerie et ses deux enfants peinent encore à trouver le sommeil et appréhende­nt avec angoisse la commémorat­ion des tragiques événements, qui aura lieu dans quelques jours.

C’est « chaque jour » et non seulement le 29 janvier que la veuve d’aboubaker Thabti, Khadija Thabti, et ses deux enfants, Mohamed, 13 ans, et Meriem, 5 ans, se rappellent le drame de la grande mosquée.

Pour celle qui a alors perdu son mari, souligner les deux ans de la tuerie est un mal obligé.

ELLE NE SORT PLUS SEULE

Depuis que son conjoint a péri sous les balles du tireur Alexandre Bissonnett­e, la mère de famille vit un véritable enfer.

« Je ne sors plus seule, confie Mme Thabti, en entrevue avec Le Journal. La nuit, je vérifie les portes et les fenêtres. Je fais toujours des cauchemars. »

« J’ai peur quand je vois des jeunes personnes de dos », ajoute-t-elle.

Ses deux enfants vivent eux aussi encore des séquelles des événements.

« Sa petite fille a toujours peur de perdre sa maman », raconte Maroua Landari, une amie qui épaule la famille depuis les premiers instants qui ont suivi le drame.

« Si sa mère sort et est en retard, elle a peur que sa maman ne rentre pas », ajoute la dame.

DES IMAGES EN DIRECT

Lorsque Khadija Thabti repense à l’attentat du 29 janvier 2017, qui a fait six morts et laissé six veuves et 17 orphelins, elle est rapidement envahie par l’émotion.

Ce soir-là, son mari, un pharmacien de 44 ans, était parti de la résidence familiale vers 18 h 30 pour aller prier à la mosquée du chemin Sainte-foy, avant de ramasser une pizza pour le souper.

C’est l’inquiétant coup de fil d’une amie qui l’a prévenue qu’un tireur avait débarqué dans le lieu de culte pour y commettre l’irréparabl­e.

Mme Thabti a rapidement été happée par la réalité en visionnant des images en direct de la tragédie sur les réseaux sociaux.

« Il y avait des vidéos où on voyait des ambulancie­rs prendre des blessés. J’étais sous le choc », raconte la veuve. «Jusqu’à 2 h du matin, ma fille me demandait “Il est où papa ? Il est où ?” », se souvient Maroua Landari.

Accompagné­e de son garçon et de son amie, Mme Thabti a passé cette nuit d’horreur à chercher désespérém­ent le père de ses enfants, en se rendant à la mosquée, cernée de policiers et d’ambulances, puis en faisant le tour de tous les hôpitaux de la ville de Québec.

Elle apprendra le décès de son époux à 14 h, le lendemain de la tuerie.

Même si la commémorat­ion des événements ravive ces douloureux souvenirs, elle constitue néanmoins un mal nécessaire, estime Charaf Amhaouch, qui accompagne les familles des victimes en prévision de la date fatidique.

« Pour le bien de la société québécoise, pour qu’on avance et qu’on ne revive plus ça, on a le devoir de se rappeler ce qui s’est passé, dit-il. Mais je ne pense pas qu’on ait besoin du 29 janvier pour se rappeler [de] la perte », ajoute-t-il.

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PHOTO DIDIER DEBUSSCHÈR­E La veuve d’aboubaker Thabti, Khadija Thabti, était bien émotive lors de sa rencontre avec Le Journal.

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