Le Journal de Quebec

Ambitions bienvenues

- ANTOINE ROBITAILLE antoine.robitaille@quebecorme­dia.com

Début août, François Legault avait laissé entendre que s’il était élu le 1er octobre, il pourrait bouder le Sommet de la Francophon­ie.

Il y avait de quoi s’inquiéter. Plusieurs comme moi ont cru le chef caquiste atteint du syndrome « né pour un petit pain », sans ambition à l’internatio­nal.

Au contraire, depuis qu’il est élu, le premier ministre Legault n’a pas hésité à consacrer du « temps de qualité » aux relations internatio­nales du Québec.

Sitôt élu, il s’est rendu à Erevan où le Sommet de la Francophon­ie se tenait. Samedi, il a entamé une im- portante mission en France et en Suisse (à Davos).

L’ILLUSION ÉCONOMIQUE

On le sait, Legault souhaite recentrer la diplomatie sur l’économie. À cinq milliards de dollars en une année, ceux-ci n’équivalent qu’à trois jours d’échange entre les États-unis et le Québec, a-t-il souligné avec raison.

L’ambition est bienvenue. Les quatre années du gouverneme­nt Couillard en ont tristement manqué, ce qui d’ailleurs marqua une triste rupture avec ce qu’il y eut de meilleur dans les années Charest : lancement de L’AECG, reconnaiss­ances mutuelles des compétence­s entre la France et le Québec, etc..

Ce n’est toutefois pas la première fois qu’un gouverneme­nt québécois prétend remettre l’économie au coeur de la diplomatie québécoise. À la radio Qub hier, l’ancien délégué général du Québec à Londres, Christos Sirros, rappelait que périodique­ment, depuis des décennies, l’idée revient.

Mais que peuvent vraiment les États dans l’économie mondialisé­e ? Le chef d’état ou de gouverneme­nt a beau être un « homme d’affaires » ou un deal maker (vocable utilisé hier par M. Legault qui a heurté le #mononc101 que je suis), rien ne garantit une croissance mirobolant­e, rappelait — toujours à Qub — l’historien et essayiste Frédéric Bastien, hier.

AUTRES DIMENSIONS

Il ne faudrait surtout pas oublier les autres dimensions du rapport France-québec : culturelle­s, historique­s, mémorielle­s.

Comme le soutient le doctorant Guillaume Lamy dans la revue Argument (vol. 21, no 1), il y a actuelleme­nt une « défrancisa­tion du Québec » et un risque de « folklorisa­tion du lien des Québécois avec la France ». Des « quantités de Québécois […] ne rêvent plus qu’en anglais », se sont détournés de la France.

Malheureus­ement, la mère patrie traverse une phase d’anglophili­e pathologiq­ue. Le rassemblem­ent des chefs d’entreprise étrangers organisé par le président Macron, par exemple, s’intitule « Choose France ».

Malgré tout, l’idée d’accueillir plus d’immigrants français au Québec, comme le prône François Legault, est pertinente. Comme le souligne Guillaume Lamy, ce n’est pas l’intérêt qui manque : 30 000 Français ont fait la demande d’un « permis vacances-travail » en 2017 et seul un demandeur sur trois l’a obtenu.

« Alors qu’on parle d’anglicisat­ion de Montréal, du plein emploi dans plusieurs régions, de pénuries d’infirmière­s, 20 000 Français n’ont pu tenter leur chance ici. »

En ces matières aussi, l’ambition du gouverneme­nt Legault est bienvenue.

Il ne faudrait pas oublier les autres dimensions de la relation Québec-France.

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