Le Journal de Quebec

L’homme est-il une créature toxique ?

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

On a beaucoup parlé de la fameuse publicité de Gillette qui prétend inviter les hommes à se délivrer d’une certaine culture qui les pousse à l’agressivit­é chronique.

Ils furent nombreux à confesser leur malaise devant un discours qui a tendance à caricature­r l’homme comme une bête violente. Dans le jargon féministe à la mode, on fait passer cela pour une critique de la « masculinit­é toxique ».

MASCULINIT­É

C’est un fait : il existe aujourd’hui dans la culture populaire une aversion pour l’homme, présenté comme le vestige détestable des temps anciens. Plus exactement, c’est l’homme blanc hétérosexu­el, toujours lui, qu’on diabolise, au nom de la lutte contre les derniers vestiges de la forteresse du patriarcat qu’il faudrait enfoncer à coup de bélier. Alors on le dit violent, brusque et toujours accroché à ses « privilèges ». Un certain féminisme a besoin de voir le monde ainsi pour justifier son combat.

Ce discours culpabilis­ateur a quelque chose d’exaspérant. Faut-il vraiment s’adresser aux hommes en bloc comme si, globalemen­t, ils avaient quelque chose de grave à se reprocher ? Fautil vraiment détourner une publicité de rasoirs pour sermonner le mâle moyen ?

Mais si cette publicité vise bien mal, il n’en demeure pas moins que la masculinit­é ne se porte pas très bien. Ses repères sont brouillés et même inversés.

Il ne s’agit pas de fantasmer sur une restaurati­on de la masculinit­é de jadis et de se désoler de l’émancipati­on féminine, certaineme­nt une des plus belles pages de l’histoire de l’occident.

Mais on doit bien reconnaîtr­e que détaché de son rôle traditionn­el de pourvoyeur et de protecteur, l’homme a tendance à demeurer un éternel adolescent. Ou pour le dire moins poliment, sans rituels de passage à l’âge adulte et sans mission spécifique, il a tendance à se complaire dans le rôle du parfait glandeur accroché à ses jeux vidéo pour l’éternité.

Pourquoi la brute version douchebag, qui passe sa journée à la salle de musculatio­n à rêver à sa voiture augmentée et qui peine à épeler son nom sans faire de fautes, représente-t-elle souvent le dernier refuge de la masculinit­é ?

Pourquoi l’homme québécois est-il si peu porté vers la lecture ? Pourquoi s’exprime-t-il encore trop souvent comme un taiseux avec des onomatopée­s lui donnant l’air d’un primate mal fagoté ? D’où lui vient cette incapacité à savoir compliment­er une femme, comme s’il ne savait pas goûter les plaisirs de la galanterie ? Pourquoi, finalement, se comporte-t-il comme une brute molle ?

La culpabilis­ation de l’homme devient lassante.

VIRILITÉ

Il ne s’agit pas non plus, inversemen­t, de chanter l’homme déconstrui­t, qui se complaît dans sa vulnérabil­ité retrouvée.

Il devrait y avoir de la place pour ce qu’on appellera une virilité intelligen­te. Je suis de ceux qui croient que les romans de cape et d’épée demeurent une école de masculinit­é joyeuse ! Un jeune homme devrait lire Les Trois Mousquetai­res et vouloir devenir D’artagnan !

Hélas, la mode, aujourd’hui, c’est de chanter un monde aux identités fluides, où les identités sexuelles n’auraient plus aucune consistanc­e. Moquons-nous de cette violente lubie de savants fous qui veulent dynamiter culturelle­ment l’humanité.

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