Le Journal de Quebec

Détenu en Syrie, un djihadiste canadien en appelle à Ottawa

Abandonné par L’ÉI, l’homme de 28 ans aimerait bien être rapatrié au Canada

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HASSAKÉ | (AFP) Détenu en Syrie par une alliance arabo-kurde, un djihadiste canadien se dit livré à lui-même, à l’instar d’autres étrangers du groupe État islamique (ÉI), et en appelle aux autorités de son pays.

Il y a neuf mois, Mohammad Ali, 28 ans, a été capturé par l’alliance des Forces démocratiq­ues syriennes (FDS) qui combat L’ÉI, alors qu’il tentait de rallier la Turquie avec sa femme canadienne et leurs deux filles.

Comme lui, des centaines d’étrangers, des hommes mais aussi des femmes et des enfants, sont retenus par les FDS qui réclament leur rapatrieme­nt vers leurs pays d’origine, lesquels se montrent réticents face à l’hostilité de leur opinion publique.

Mohammad Ali a été interrogé par L’AFP dans un centre de détention de Hassaké en présence de deux membres des FDS. L’AFP n’a pas pu vérifier de manière indépendan­te le récit qu’il a fait de son parcours et de ses activités au sein de L’ÉI.

PARCOURS

Ce Canadien né de parents pakistanai­s a rejoint L’ÉI en 2014 sous le nom de guerre Abou Tourab al-kanadi. Il dit avoir été longuement interrogé par la CIA et des responsabl­es militaires américains durant sa détention par les FDS.

« Chaque fois que je suis emmené à un interrogat­oire ou un entretien, j’espérais que ce serait avec quelqu’un du gouverneme­nt canadien, quelqu’un qui peut me donner un peu d’espoir », indique Mohammad Ali.

« Jusqu’à maintenant, rien. Je n’ai nulle part où aller », dit le jeune homme.

Le ministère des Affaires étrangères du Canada a indiqué avoir établi un canal de communicat­ion avec les autorités kurdes syriennes, mais a ajouté qu’il n’y avait aucun accord pour des rapatrieme­nts à ce jour.

Selon L’ONG Familles contre l’extrémisme violent, quelque 25 Canadiens sont retenus par les FDS.

RÉTICENCE

Comme le Canada, plusieurs gouverneme­nts occidentau­x se montrent réticents à rapatrier ces djihadiste­s.

Mohammad Ali affirme avoir rejoint L’ÉI pour lutter contre le pouvoir de Bachar al-assad. Fort de son expérience dans l’industrie pétrolière au Canada, il dit avoir été employé pendant quatre mois au « ministère du Pétrole » établi par L’ÉI, fonction durant laquelle il a utilisé son compte Twitter, très suivi, pour lancer des appels à rejoindre le groupe djihadiste.

Il a ensuite endossé la casquette de combattant et de formateur, mais prétend avoir « refusé de tirer sur des civils ».

Le Canadien se dit « épuisé » et s’accorde de longues pauses avant de marmonner ses réponses.

C’est en 2016 que le jeune homme com- mence à douter de L’EI qui recule face aux offensives et se retourne selon lui contre les étrangers. Un ami hollandais sera exécuté, affirme-t-il, sans vouloir s’attarder sur la question.

« Les étrangers se sentaient abandonnés, lâchés, ils ont été utilisés et on a abusé d’eux » au sein de l’organisati­on, avance-t-il.

Mohammad Ali paye un contreband­ier pour entreprend­re avec sa femme, également liée à L’ÉI et rencontrée en Syrie, le périlleux passage vers la Turquie, depuis la province de Deir Ezzor.

Il voulait se rendre à l’ambassade du Canada à Ankara, mais la famille a été arrêtée avant de franchir la frontière, dit-il. Mohammad Ali se rend compte qu’il risque d’aller en prison, en cas de retour au Canada.

RÉSISTANCE

Sur le terrain, hier, les forces arabokurde­s en Syrie ont fait face hier à une résistance acharnée de l’état islamique acculé dans son ultime poche dans l’est du pays, où 16 civils ont péri dans des raids de la coalition internatio­nale selon une ONG.

Cette coalition internatio­nale dirigée par les États-unis soutient au sol et dans les airs les Forces démocratiq­ues syriennes (FDS) qui ont lancé il y a trois jours un assaut « final » pour chasser les djihadiste­s de leur réduit dans la province orientale de Deir Ezzor, frontalièr­e de l’irak.

« Les violents combats se poursuiven­t pour obliger L’ÉI à se rendre », a souligné le directeur de l’observatoi­re syrien des droits de l’homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane.

« Les FDS progressen­t lentement dans la poche de L’ÉI », avec l’appui des raids aériens et des tirs d’artillerie de la coalition, selon L’ONG. Les tireurs d’élite, les mines enfouies et les tunnels creusés par les djihadiste­s ralentisse­nt toutefois les opérations, a souligné L’ONG.

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PHOTO AFP Mohammad Ali, 28 ans, a été interrogé dans un centre de détention de Hassaké, en Syrie, en présence de deux membres des Forces démocratiq­ues syriennes.

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