Le Journal de Quebec

Suicide démographi­que ? Mauvaise idée !

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ Blogueur au Journal Sociologue, auteur et chroniqueu­r mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com @mbockcote

Faut-il cesser de faire des enfants pour sauver la planète ? C’est la nouvelle idée à la mode. Elle circule dans les milieux « évolués », qui se veulent à l’avant-garde du progrès.

Généraleme­nt, celui qui l’avance contracte le visage et explique que son propos, aussi difficile à entendre soit-il, est néanmoins nécessaire. L’empreinte écologique de l’être humain serait telle qu’il faudrait mettre le cap sur la décroissan­ce démographi­que. Ainsi le voudrait l’urgence climatique.

QUÉBEC

C’est la thèse de l’humanité-parasite. Mais précisons-le : elle n’est pas destinée à l’ensemble de l’espèce. La surpopulat­ion de la Chine ne nous concerne apparemmen­t pas. Celle de l’afrique non plus. Ce sont les Occidentau­x qui doivent programmer leur disparitio­n ou leur régression.

Le message s’adresse aussi aux Québécois : eux non plus ne devraient plus faire trop d’enfants. Mais soyons sérieux un instant : imaginons que les Québécois, d’un coup, pris d’un grand désir de sauver la planète, soient prêts à s’immoler pour elle. Collective­ment, ils feraient le choix de la disparitio­n. Cela n’aurait à l’échelle de la planète aucun effet. Personne ne s’en rendrait compte. On pourrait appeler ça : disparaîtr­e pour rien.

Nous sommes dans le domaine de l’irrational­ité collective. On ne se soucie pas de l’efficacité de notre action. On veut avoir bonne conscience et afficher sa vertu écologique au monde entier.

Tant qu’on abordera la question de la surpopulat­ion globale dans la seule perspectiv­e occidental­e, nous n’en parlerons pas sérieuseme­nt. Notre modèle de civilisati­on antiécolog­ique et fondé sur la surconsomm­ation doit être réformé, évidemment. Mais en conclure aux vertus de notre propre extinction est délirant.

Je ne peux m’empêcher de faire un parallèle historique. Il y a quelques décennies, nos curés expliquaie­nt aux femmes qu’elles devaient donner des familles nombreuses à la nation. Aujourd’hui, certains curés verts leur expliquent qu’elles ne doivent pas en avoir pour sauver le genre humain. Dans les deux cas, il s’agit de contrôler le corps des femmes au nom d’une raison supérieure. Dans les deux cas, il s’agit d’encadrer la liberté des femmes au nom d’un programme politique. Pourquoi serait-ce inacceptab­le dans le premier cas et acceptable dans le second ?

Avoir des enfants est la décision la plus personnell­e qui soit. La plupart sont appelés à en avoir. C’est la pulsion de vie qui s’exprime à travers ce désir irrépressi­ble, qui rend possible la suite du monde. D’autres n’ont pas cette vocation. Il serait mesquin de les stigmatise­r. Il faut, en la matière, respecter les conscience­s. Mais globalemen­t, une société qui chercherai­t à étouffer cette pulsion de vie s’autodétrui­rait, en annihilant ce qu’il y a de plus fort chez l’humain.

NÉANT

Il serait fou qu’une civilisati­on se laisse hypnotiser par la tentation du néant au point de croire que la seule chose qu’elle peut encore offrir au monde soit sa disparitio­n. Il faudra un jour écrire l’histoire de la mauvaise conscience occidental­e qui pousse notre civilisati­on à croire qu’elle a le monopole du mal. Ce désir de mort qui nous hante maquillé en vertu écologiste doit être combattu.

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