Le Journal de Quebec

Plus envie d’être proprios

- JEAN-DENIS GARON jean-denis.garon@quebecorme­dia.com Jean-denis Garon est professeur à L’ESG UQAM.

On assiste présenteme­nt à des hausses de prix des loyers et à une baisse des taux d’inoccupati­on. Résultat : plusieurs familles n’ont toujours pas de toit depuis le premier juillet. Les débats sur l’accès au logement ont donc repris de plus belle.

Les données suggèrent que l’offre de logements locatifs n’augmente pas au rythme de la demande. Les lobbys des locataires cherchent, depuis des lunes, des coupables pour expliquer cette tendance lourde.

AU BANC DES ACCUSÉS

On a d’abord ciblé la conversion d’immeubles locatifs en copropriét­és divises, que l’on a catégoriqu­ement limitée par un moratoire.

Le moratoire a été contourné, spécialeme­nt par la constructi­on de copropriét­és indivises.

Plutôt que de construire de nouveaux logements locatifs, les promoteurs se sont lancés dans le secteur du condo neuf. Une tendance qui s’est étendue jusqu’à d’anciennes zones industriel­les.

On a ensuite forcé les promoteurs de condos à inclure des « logements sociaux » dans plusieurs projets.

On a aussi subvention­né la création de coopérativ­es de logements, parfois occupées par des ménages financière­ment aisés. Mais la crise continue. Le coupable du jour est bien entendu Airbnb.

Le géant priverait le Québec de milliers de logements.

PETITS PROPRIOS

Les défenseurs du droit au logement demandent, avec raison, une nouvelle vague de réglementa­tion pour protéger le logement locatif.

Mais ils ferment les yeux sur un aspect crucial du problème.

Les propriétai­res de logements ne sont pas des milliardai­res.

Une part importante d’entre eux sont des familles de la classe moyenne. Ils possèdent quelques logements en guise de fond de retraite. Ce sont des gens normaux qui, au lieu d’avoir un gros REER, ont investi dans la brique.

Ces plus petits propriétai­res sont de moins en moins intéressés à avoir des locataires. La réglementa­tion des prix des loyers ne leur permet souvent pas de rentabilis­er les rénovation­s. Les recours à la régie du logement leur rendent la vie impossible.

Et ils vivent dans l’angoisse de retrouver leur logement dans un état lamentable au 1er juillet.

Alors ils contournen­t les règles et se tournent vers Airbnb.

Peut-on vraiment les blâmer ?

UN COMPROMIS

Les propriétai­res demandent un retour du balancier : l’établissem­ent d’un dépôt de sécurité payé par les nouveaux locataires.

Les modalités d’une telle mesure pourraient être négociées de façon à en faciliter le paiement. Il pourrait être versé mensuellem­ent, par exemple, pendant la première année de location. Et il pourrait être protégé par la Régie du logement.

Cette mesure serait à l’avantage des bons locataires, une majorité qui paie trop souvent pour les autres.

Les propriétai­res doivent présenteme­nt souscrire à une assurance pour dommages causés. Ces frais sont partiellem­ent refilés à tous les locataires, même les bons. Lorsque les propriétai­res paient les dommages de leurs poches, les bons locataires finissent aussi, indirectem­ent, par payer.

Les propriétai­res ne couvriront jamais entièremen­t leur risque avec un dépôt d’un mois ou deux.

Ce n’est d’ailleurs pas ce qu’ils demandent. Ils désirent responsabi­liser les locataires délinquant­s qui détérioren­t leur patrimoine.

Ce n’est pas tant demander.

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