« Faites quelque chose, bordel ! »
Des artistes country réclament un meilleur contrôle des armes à feu
La chose aurait été impensable il y a quelques années : plusieurs artistes country critiquent Donald Trump et réclament un meilleur contrôle des armes à feu après les tueries du week-end aux États-unis.
Bien qu’elles gagnent leur vie en préconisant un style de musique dont l’auditoire est majoritairement républicain, les chanteuses Maren Morris et Kacey Musgraves n’ont pas hésité à réclamer un resserrement des lois en matière d’armes. Le groupe Brothers Osborne et Brandi Carlile ont également envoyé des appels semblables.
Lauréate de plusieurs prix Grammy, Musgraves a partagé sa frustration dimanche sur scène au festival Lollapalooza, un jour après les massacres de Dayton en Ohio et d’el Paso au Texas, qui ont fait 31 morts. Dans une vidéo de fan publiée sur internet, on peut l’entendre lancer : « Faites quelque chose, bordel ! » (« Somebody fucking do something ! »). Et quelques heures plus tard, sur Twitter, la native du Texas en rajoutait une couche en décriant l’inaction du président des États-unis. « Pour un homme qui veut autant être aimé, c’est aberrant de voir qu’il ignore sciemment la seule chose qui pourrait non seulement rendre les gens heureux, mais sauver des vies. »
Pour sa part, Maren Morris a exprimé son mécontentement en publiant le message suivant sur Twitter : « Si j’aperçois un politicien ressortir son communiqué de “pensées et prières” qu’il garde en réserve pour chaque fusillade de masse, je vais être malade. Nous avons besoin d’une réforme sensée. »
VIRAGE
Il y a quelques années, ce type de montées aux barricades provenant d’un artiste country aurait été perçu comme un suicide professionnel. On n’a qu’à penser aux Dixie Chicks, qui ont vu leur carrière piquer du nez en 2003, après qu’elles eurent critiqué le républicain George W. Bush. Les radios country avaient même arrêté de jouer leurs chansons, en guise de protestation.
Selon le chroniqueur et journaliste spécialisé en musique Nicolas Tittley, la tuerie de Las Vegas de 2017, orchestrée en plein festival de musique country, a provoqué un virage, grâce entre autres au témoignage du guitariste du Josh Abbott Band, l’un des groupes au programme du rendez-vous. Dans un message hyper médiatisé, Caleb Keeter, un ardent défenseur du second amendement (le droit de porter une arme), avait affirmé que l’horrible événement lui avait ouvert les yeux et qu’il avait changé son fusil d’épaule — au figuré.
« Comme l’amérique, la musique country se transforme et évolue, commente Nicolas Tittley. De nouvelles voix se font entendre. »
Selon Patrick Binette, directeur des contenus à Stingray, la nouvelle vague d’artistes country a beaucoup moins peur des répercussions que pourrait entraîner une prise de position en opposition à l’électorat républicain.
« Ils ont une clientèle plus large et plus jeune. [...] Ils sont moins dépendants des radios conventionnelles, comme l’étaient les Dixie Chicks à l’époque. »