Le Journal de Quebec

Trump à la télé, une insulte à la nation

- guy.fournier @quebecorme­dia.com

Malgré 31 morts et 51 blessés dans les deux tueries du week-end, le président Donald Trump n’a trouvé, hier matin, que des mots creux pour panser les plaies de ses concitoyen­s éprouvés.

Des mots auxquels il ne souscrit même pas. Des mots qu’il lit sur un télésouffl­eur, les yeux plissés, avec la maladresse d’un élève du primaire. Dans cet hypocrite soliloque de neuf minutes et 32 secondes, Trump a trouvé le moyen de glisser le poncif usé que « ce n’est pas le fusil qui tire, mais le malade qui actionne la gâchette ».

La télévision est un impitoyabl­e révélateur. J’ai écouté trois fois de suite l’allocution du président. Malgré ma bonne volonté, je n’ai pu y déceler un seul moment de sincérité. Rien qui puisse ressembler au message poignant de Barack Obama après la tuerie de Sandy Hook. Rien qui approchait le discours bien senti d’un George W. Bush, consterné après le 11 septembre 2001.

COMME UN ROBOT

Trump a lu comme un robot le discours qu’avait sans doute écrit son rédacteur habituel, Stephen Miller. Ce dernier, qui a déjà déclaré à la télévision que Trump « est un génie », se bat pour la constructi­on du mur entre les É.-U. et le Mexique. Lui et Steve Bannon sont responsabl­es de l’executive Order 13769 restreigna­nt l’entrée aux États-unis des ressortiss­ants de sept pays arabes.

Dans son allocution, Trump lance un appel à l’unité du pays et supplie les républicai­ns et les démocrates de trouver des solutions bipartisan­es à ces tueries insensées. « Les plaies ouvertes, a-t-il dit, ne peuvent pas guérir si nous sommes divisés. »

Comment cet homme peut-il faire appel à l’unité alors qu’il n’a pas cessé de monter les uns contre les autres ? N’est-ce pas lui qui vient de demander à quatre concitoyen­nes de retourner dans leurs pays d’origine si « elles ne sont pas contentes » ? N’a-t-il pas accusé le maire de Baltimore, un Noir, de diriger une ville infestée de rats et de criminels ?

Comment cet homme peut-il faire appel à l’unité alors qu’il n’a pas cessé de monter les uns contre les autres ?

UNE CONTRADICT­ION APRÈS L’AUTRE

Comble de l’ironie, Donald Trump s’en est pris sans aucune nuance à l’internet et aux médias sociaux. « Il faut admettre, a-t-il déclaré, que l’internet a ouvert une large avenue aux personnes radicalisé­es, aux esprits dérangés capables de commettre des actes aussi insensés. » Le président a ajouté qu’on ne peut ignorer le rôle que jouent l’internet et les réseaux sociaux dans le trafic d’humains et la distributi­on illégale de drogues.

C’est ce même président qui sort du lit au petit matin pour rédiger des tweets insultants pour ses concitoyen­s et ses rivaux politiques, pour dire pis que pendre des Mexicains ou pour traiter de stupides des chefs de gouverneme­nt, alliés des États-unis depuis toujours, et vanter les mérites de dictateurs qui en sont les ennemis.

Enfin, le président Trump n’étant jamais à une contradict­ion près, a dénoncé la glorificat­ion constante de la violence qu’on fait dans son pays. Il s’en est pris en particulie­r aux jeux vidéo « infâmes et sinistres » (ce sont ses qualificat­ifs), mais il n’a rien dit du cinéma et de la télévision qui font de la violence leur scénario quotidien.

Si j’étais américain, je prendrais ce message à la nation comme une véritable insulte.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada