Le Journal de Quebec

Trudeau : champion des promesses… respectées

- ANTOINE ROBITAILLE Blogueur au Journal antoine.robitaille@quebecorme­dia.com

Affirmer qu’un politicien a respecté ses promesses est presque surprenant aujourd’hui.

N’importe quel vox pop le démontrera, l’homme et la femme de la rue croient que les politicien­s « disent n’importe quoi pour se faire élire ».

Or, vérificati­ons faites, ce n’est pas vrai. À l’université Laval, jeudi, lors d’une table ronde sur le bilan du gouverneme­nt Trudeau, le professeur François Pétry était formel : « Les politicien­s tiennent leurs promesses ».

Pétry et sa complice Lisa Birch (que j’ai reçue à Qub radio hier) ont, depuis une quinzaine d’années, développé et raffiné une méthode rigoureuse pour évaluer le taux de respect des promesses.

Après une élection générale, ils compilent les communiqué­s du parti qui l’a emporté, décortique­nt les plateforme­s, aboutissen­t à une liste de promesses auxquelles ils accordent un statut : soit « réalisées », « en voie de réalisatio­n ou partiellem­ent réalisées », « en suspens », et, enfin, « rompues ».

Ils affichent cette liste en ligne et durant le mandat, suivent l’évolution de chacune. (voir www.polimetre.org/fr/canada/42-trudeau-plc)

TRÈS BON SCORE

Les libéraux de Trudeau ont énormément promis en 2015. Le polimètre comprend 353 engagement­s ! Un record.

Mais Pétry et Birch écrivent, dans la conclusion de leur livre collectif Bilan du gouverneme­nt libéral de Justin Trudeau (éditions PUL) : « Le gouverneme­nt Trudeau a réussi à apporter un réel changement en réalisant en tout ou en partie 90 % de ses 353 promesses électorale­s ».

Quand je suis allé sur leur site hier, ils en étaient à 93,5 % de promesses respectées : (61,8 % « réalisées » ; 31,7 % « en voie de réalisatio­n ou partiellem­ent »). La campagne étant entamée, ces chiffres ne devraient plus bouger !

NUANCES

Évidemment, comme souvent en « science sociale », il faut aller au-delà des chiffres.

Il est très intéressan­t, et même capital, de compiler toutes les promesses, mais elles sont loin de toutes s’équivaloir.

La méthode de Pétry et Birch distingue d’ailleurs, entre autres, les promesses « transforma­tionnelles » – donc porteuses de grands changement­s – et d’autres qualifiées de « transactio­nnelles », visant des modificati­ons précises, concrètes. Par exemple établir un nouveau crédit d’impôt.

Il y a aussi des promesses plus générales, intangible­s, difficilem­ent quantifiab­les. Prenons le serment de Trudeau de gouverner selon l’idéal des « voies ensoleillé­es ».

Un petit nombre de promesses majeures rompues peut aussi laisser l’impression dans la population que l’on est devant un premier ministre ne respectant pas sa parole.

Le gouverneme­nt Trudeau a par exemple rompu toutes ses promesses liées aux finances publiques, comme l’a souligné l’économiste de Polytechni­que, Marcelin Joanis, jeudi.

Et à cela s’ajoute l’abandon de la réforme du mode de scrutin et le surplace en matière de lutte contre les changement­s climatique­s.

Ce qui fait dire à l’ancien chef du NPD, Thomas Mulcair, en préface à l’ouvrage, que le gouverneme­nt Trudeau a certes réalisé plusieurs de ses promesses, mais qu’il a renoncé à celles qui auraient changé l’« ordre établi ».

Aux électeurs de juger maintenant. Mais comme d’habitude, ils ne le feront pas uniquement en fonction du bilan du gouverneme­nt, mais aussi sur... les prochaines promesses.

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Lisa Birch, directrice générale du Centre d’analyse de politiques publiques (Université Laval)

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