Le virage d’une école qui vise le sommet
Parti des bas-fonds du palmarès, un établissement scolaire de Lanaudière s’est remis sur les rails
L’arrivée d’un nouveau directeur déterminé à changer les choses a permis à une école de Lanaudière minée par des problèmes de violence et de consommation de se remettre sur les rails, ce qui la place cette année parmi les écoles les plus améliorées au Québec.
Quand Simon Vézina a mis les pieds à l’école du Havre-jeunesse de Sainte-julienne pour la première fois, il y a quatre ans, il avait un message très clair pour sa nouvelle équipe. L’établissement allait quitter les basfonds du classement des écoles secondaires du Journal.
« J’ai pris le Palmarès des écoles, où on était complètement en bas. J’ai retourné la feuille de bord et j’ai dit : “c’est là qu’il faut qu’on s’en aille” », se remémore-t-il, pointant tout en haut.
Évidemment, un tel revirement ne se fait pas du jour au lendemain, mais en trois ans à peine l’école du Havre-jeunesse semble relancée. Sa cote globale sur 10 est passée de 1,5 en 2015 à 3,2 cette année et, surtout, son pourcentage d’élèves en situation d’échec a fondu de moitié durant la même période.
STOPPER LE CHAOS
Première étape de ce virage : mettre fin au bordel qui régnait dans les corridors de l’école de près de 700 élèves.
Pour ce faire, la direction a redisposé les casiers, créé des locaux de pause et resserré le va-et-vient dans l’école. L’accompagnement des élèves aux prises avec des problèmes comportementaux ou de consommation a aussi permis au personnel de reprendre son souffle.
« Quand je suis arrivé, les profs me disaient qu’ils avaient peur de se promener dans les corridors parce que ça brassait trop », raconte le directeur. « On a donc commencé par sécuriser notre personnel, et quatre ans plus tard, on a enfin l’air d’une école normale. »
Émélie Valois, une ancienne enseignante de français devenue directrice adjointe, a vécu les « deux Havre-jeunesse », séparées par un monde de différence. « Quand je suis arrivée, il y a huit ans, je voulais partir aussi vite. Je pensais partir, et je n’étais pas la seule », admet-elle, parlant d’une ambiance « chaotique » qui créait un fort roulement de personnel.
PÉDAGOGIE RÉVISÉE
Le calme revenu, la direction a ensuite pu établir sa volonté de revenir à la mission première d’une maison d’enseignement, soit la pédagogie. Simon Vézina a choisi d’entourer ses enseignants de spécialistes pour qu’ils puissent se concentrer à faire ce qu’ils font de mieux.
« Quand on voit qu’il y a un besoin, on les ouvre, les budgets », lance sans détour le directeur, citant en exemple les communautés d’apprentissage professionnelles (CAP) mises en place dans plusieurs matières.
Quelques fois par année, les enseignants de tous les niveaux d’une même matière se rassemblent pour cibler précisément les difficultés rencontrées par les élèves. L’exercice permet d’éviter l’isolement de certains élèves et met à profit l’expérience de tous.
« C’est un temps d’arrêt, un rapport réflectif sur nos pratiques, explique l’enseignante de français Béatrice Bourgeois, qui se réjouit de l’exercice. On a même accueilli une universitaire, docteure en didactique, pour nous accompagner, l’an dernier ».
« On entre ça dans les budgets de l’école parce que ce sont nos élèves qui en bénéficient. Ça colmate les failles où elles sont », ajoute M. Vézina.
PAS TERMINÉ
Avec son renouveau bien en place, l’école du Havre-jeunesse commence à récolter les fruits de ses efforts. Mais le travail ne fait que commencer, prévient Simon Vézina.
« Oui, on a coupé les échecs de moitié et amélioré la situation, mais ce n’est pas satisfaisant encore », affirme l’ambitieux directeur, qui veut aider encore mieux les garçons de son établissement, trop souvent en difficulté.
« Il reste nos petits gars. Je voudrais que ceux qui ont de la difficulté, on puisse les emmener par exemple au DEP, plutôt que de les voir doubler, redoubler, tripler, etc. On veut travailler la motivation de nos gars, c’est notre prochain défi. »