Scheer peut-il changer ?
Si Andrew Scheer prépare une grande transformation qui le rendra plus attrayant aux yeux des électeurs canadiens et québécois, le chef conservateur cache bien son jeu.
M. Scheer a passé sept heures, mercredi, claustré à l’intérieur d’une salle sans fenestration, entouré de quelque 150 de ses collègues conservateurs, députés et sénateurs.
Ils étaient tous réunis dans la même pièce pour une première fois depuis leur défaite électorale. Par dizaines, ils se sont succédé au micro afin d’exprimer directement à leur chef leur frustration. INTROSPECTION
On aurait pu s’attendre à ce que M. Scheer ressorte de l’exercice repentant et contrit. Ce ne fut pas le cas.
En point de presse devant les journalistes après la rencontre, M. Scheer a laissé écouler trois petites minutes avant de déclencher les premières salves envers le premier ministre Trudeau.
Le chef conservateur aurait pu profiter de l’occasion pour exposer ses facultés d’introspection. Il a préféré immédiatement retrouver le confort de la partisanerie et de l’autocongratulation.
En reprenant cet air connu, M. Scheer donne ainsi des munitions à ceux, dans ses rangs, qui doutent de sa capacité à changer en mieux, afin d’offrir un résultat différent lors du prochain scrutin. FOND OU FORME ?
À entendre M. Scheer, la performance électorale décevante de son parti repose essentiellement sur un problème de communication, particulièrement sur les questions sociales, comme l’avortement ou le mariage gai.
Or, le mal est peut-être plus profond.
Sur l’avortement, par exemple, les conservateurs de M. Scheer assurent n’avoir aucune intention de limiter ce droit. On martèle que la position du parti en la matière est la même que celle adoptée par Stephen Harper, qui a dirigé le pays pendant près de 10 ans.
Mais se pourrait-il que les Canadiens et les Québécois aient, eux, évolué ? Promettre de ne pas rouvrir le débat sur l’avortement est une chose. Protéger, renforcer et étendre ce droit en est une autre.
DÉCALAGE
Il se trouve que M. Scheer est farouchement contre le droit à l’avortement et le mariage gai. Ce dernier a évidemment droit à ses valeurs. Il appert seulement qu’elles ne sont pas, à bien des égards, en phase avec celles d’une majorité de Québécois, en 2019.
Certains conservateurs estiment que M. Scheer est « brûlé » au Québec en raison de ce décalage qui a éclaté au grand jour durant la campagne électorale.
Il est bien possible que ce constat, implacable, ait été clairvoyant.
À entendre M. Scheer, la performance électorale décevante de son parti repose essentiellement sur un problème de communication.