Encore bien des sanctions sont clémentes
Près de la moitié des professionnels ont eu une radiation plus courte que les cinq ans minimum imposés pour inconduite sexuelle, montre la compilation du Journal.
Des 53 sanctions rendues depuis juin 2017, 25 professionnels (47 %) ont été radiés moins de cinq ans.
Parmi eux, l’infirmier auxiliaire Blaise Osler a été radié 18 mois pour avoir agressé une collègue, et le psychologue Mario Thibodeau a été sanctionné 10 mois pour avoir proposé à une patiente de 16 ans de l’initier à la sexualité.
« Le Québec, ce n’est pas le royaume de la sévérité, pas le royaume du tough on crime, réagit l’avocat Marc Bellemare, qui défend des victimes.
On a tendance à être extrêmement compréhensifs. »
MIEUX TOUT DE MÊME
En fait, le Code des professions impose une radiation minimale de cinq ans, à moins que le professionnel convainque le conseil de discipline qu’il mérite une sanction plus courte.
« Chaque cas a ses particularités, répond la présidente en chef du Bureau des présidents des conseils de discipline, Marie-josée Corriveau. Les conseils de discipline doivent individualiser les circonstances de chaque dossier pour déterminer la sanction appropriée. »
Selon un avocat spécialisé dans la question, l’imposition d’une radiation de cinq ans a néanmoins donné un sérieux coup de barre. Avant 2017, elles étaient de l’ordre de « quatre à six mois ».
« Globalement, les sanctions ont été nettement rehaussées [depuis] », dit Me Marco Laverdière, enseignant et chercheur associé en droit et politiques de la santé à l’université de Montréal et à l’université de Sherbrooke.
PROTECTION DU PUBLIC
«Il y a une réticence à empêcher les gens de gagner leur vie, ça joue quand même beaucoup. La finalité d’une loi professionnelle, c’est la protection du public.»
Depuis 2017, plusieurs accusés ont plaidé que leurs gestes avaient été posés avant la réforme, et que les nouvelles sanctions ne s’appliquaient pas.
Par ailleurs, Me Bellemare ne cache pas qu’il voudrait voir des sanctions plus sévères.
« [Le professionnel] n’est pas privé de sa liberté, il continue à respirer. Ce n’est pas une peine comme cinq ans de prison. »
DÉCOURAGEMENT
De son côté, Me Laverdière craint que la sanction minimale de cinq ans décourage les professionnels à plaider coupable, et complique la tâche du syndic.
« Plus la sanction est élevée, moins il y a d’incitatifs à plaider coupable, dit-il. […] Quand il n’y a pas de plaidoyer, il faut faire témoigner la victime. »